Le mot du mois

LE MOT DU MOIS

"Manger, c'est incorporer un territoire".

Jean Brunhes, géographe français (1869-1930)

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"Au fond des provinces, il existe des Carême en jupon, génies ignorés, qui savent rendre un simple plat de haricots digne du hochement de tête par lequel Rossini accueille une chose parfaitement réussie".

de Balzac, La Rabouilleuse, 1842.

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"Les animaux se repaissent, l'homme mange, l'homme d'esprit seul sait manger"

Jean Anthelme Brillat-Savarin (1755-1826).

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- Critiques 2013 -

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Bilan de l'année

2013 a été un bon cru. Bien sûr, il y a eu moins de fourchette d'or (deux seulement), cela étant en partie imputable à la nouvelle notation et l'apparition de la mention "Top Créole". Le but étant de mettre la barre plus haut dans l'exigence de qualité. Nous n'avons hélas pas trouvé cette qualité dans les restaurants "pur créoles" que nous avons visité, mais beaucoup d'entre eux méritaient quand même plus que la fourchette en argent.  Cela fait trois ans que nous parcourront l'île de long en large pour trouver les "perles rares". Certaines de ces perles ont été contestées, et il est certain que les premières fourchettes d'or mériteraient d'être testées à nouveau. C'est ce à quoi nous allons nous employer en 2014. Merci à tous pour votre fidélité.
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[Bali à la Souris-Chaude]

Aujourd'hui nous vavanguons sur le littoral de la longiligne commune de Trois-Bassins, qui s'étend du battant des galets au sommet des bois d'acacias, pour tester la cuisine d'une autre souris, balinaise celle-là, le Tikus Garden, sorte d'oasis de verdure et de fraîcheur dans le néant brûlant de la savane de l'Ouest qu'un Ennio Morricone aurait pu traduire en musique. 
Nos fidèles lecteurs l'auront remarqué : nous gastronomons de plus en plus métro, parce que, comme le parabolait humoristiquement un Trois-Bassinois illustre (Daniel Vabois, pour ne pas le citer), pour imager l'infidélité coupable de la chair,  "tout l'temps cari canor, cari canor, d'ta zen temps vi veut mange une 'tite pintade !"
Oasis est le mot. Et une seule visite n'est pas suffisante pour apprécier à sa juste valeur ce joli jardin, gardé par des bouddhas, où les tables de bois disposées à l'ombre, les nombreuses statues orientales et les bassins où nagent quelques poissons, nous paient un billet pour le dépaysement. Les familles y trouveront leur compte, il y a de la place pour laisser galoper la génération en culotte courte. Les amoureux aussi seront contents, dans les petits kiosques plus intimistes.
Nous nous installons, et prenons le temps de consulter avec gravité le tableau du menu posé devant nous, en sirotant un savoureux cocktail de fruits frais au rhum et au coco, proposé par notre hôtesse.
Sept entrées et huit plats sont affichés entre 11 euros, pour une "tarte chaude de fromage et sa salade verte" et 26 euros pour le "filet de bœuf, sauce poivre de Mada". Notre choix à nous se porte sur une "Terrine de fois gras maison, marbré au pain d'épices", un "Melon et jambon de Savoie et son shooter de Porto", suivis d'une "cassolette de la mer (poisson du jour, crevettes) parfumé à la Reine des près et un "Pavé de Dorade, sauce gingembre". 
Le temps que toute cette cavalerie débarque, nous profitons de la vue magnifique en sirotant nos cocktails, nos papilles éveillées par des petits croûtons accompagnés d'une anchoïade aux olives noires.


Voici la terrine. La première bouchée et c'est le déluge de sensations gustatives, accentué par la texture moelleuse du foie, qui nous envoie aux orgues de Staline le piquant d'un poivre vasodilatateur, une romance ambrée de cannelle, et l'humeur musquée du foie lui-même en milieu de langue. Un plat parfaitement en accord avec la déco orientale, en quelque sorte. Ventre-saint-gris nous regrettons nos croûtons et un petit verre de blanc que Cunégonde Modération nous interdit par ces chaleurs, avec la route à faire  !


Voici le melon. Dans son plus simple appareil servi, en tranches coupées, mais sans porto, sauf erreur. La fraîcheur poivrée du cucurbitacé, alliée au fumet charpenté du jambon qui remugle encore ses fonds de moisissures de cave où il a jadis imité les chauves-souris, nous donne un mariage tout à fait honnête qu'une petite salade verte accompagne judicieusement. Du déjà vu, somme toute, mais à propos par cette température.

Valse des assiettes et les plats de résistance arrivent. 



Voici la cassolette. On pourrait croire comme ça, au premier coup d'oeil, que les quantités ne contenteraient pas un moineau anorexique. Il n'en est rien. Nous plongeons à tartine rabattue dans le délicieux jus des fruits de mer, sentant la marée et les fonds de sable mouillé à la limite de l'eau quand on clapotait étant petits à la recherche des crabes et des mollusques depuis longtemps disparus. Des saveurs marines où des effluves de fines herbes viennent soutenir les morceau de poisson quand ils passent sous la dent.


Voici la dorade. La cuisson du poisson est un art que maîtrise visiblement le chef. Une équation chaleur + temps fort bien résolue ici, puisque la chair, cuite au mieux, pas sèche pour un sou, a conservé son goût un peu sauvage de poisson frais, soutenu par une sauce au gingembre pas trop envahissante. Du vrai plaisir au bout de la fourchette.
Le poisson et la cassolette étaient accompagnés d'un riz bien blanc, sous une présentation originale.
Nous clôturons ce repas avec des tartes, aux framboises et au citron, sur lesquelles nous avons aucun commentaire particulier à faire. Elles étaient bonnes. Rien de transcendant.
L'addition s'avère un peu salée : 53 euros par tête de touriste, pas moins. 

Le Tikus Garden est assurément une adresse à conserver dans son calepin. L'endroit est accueillant et invite à la décontraction et au farniente. Un paradis pour adeptes de yoga. Le contraste avec son environnement immédiat est saisissant. Concernant la cuisine de l'établissement, notre expérience d'aujourd'hui est parfaitement concluante. En dépit des apparences, les quantités sont correctes. Les plats sont savoureux et vous font passer un agréable moment gustatif. Bien sûr, quelques petits couacs sont à déplorer : un Porto absent, oubli du sucre avec le café (oui les ayatollahs du café apprécieront, on sait !), et un verre décoré qui perd sa décoration comme zoreil qui pluche après un coup de soleil. Plus des tarifs un peu chauds.
La perfection n'existant pas, et notre contentement ayant été largement atteint de toute manière, nous attribuons au Tikus Garden une jolie fourchette d'or en récompense pour son accueil, son cadre magnifique et sa cuisine simple et inventive à la fois qui met en avant, comme disait D.V, "le goût, oté !"


Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : superbe • Présentation des plats : très bien
Service : bien • Qualité des plats : excellent
IMPRESSION GLOBALE : TRES BONNE TABLE

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C'est sous un ciel radieux avec la chaleur de saison que nous décidons de partir pour la bonne ville de Saint-André, en plein bazar du samedi, afin de nous sustenter chez Nehoua, au restaurant Kom' la Case, à cinquante mètres derrière l'église.

Une belle terrasse contenant près de 70 couverts nous accueille, avec son pied de letchis qui apporte un peu de fraîcheur à l'endroit. On nous reçoit avec le sourire. Nous nous installons sous l'arbre et l'on nous sert une désaltérante à mousse avec la carte.
Carte chinoise pour l'essentiel. Pas moins d'une cinquantaine de plats aux viandes diverses, des sautés et shop-suey pour la plupart. 
Sur commande on peut également déguster cari bichiques, civet d'autruche ou dinde aux marrons, entre autres. Deux formules, «Ti case» et «Ti villa», associent entrées et plats de résistance pour 17 ou 25 euros par personnes. 
Pour leur part les plats du jour sont bien créoles : on nous propose un cari poulet palmiste et un civet de cerf. Nous optons pour ce dernier et commandons un plat de sarcives, de haute réputation, nous a-t-on informés. Ils sont servis en quantité honnête, assez pour nous permettre de les apprécier à leur juste valeur. Et leur réputation n'est certes pas usurpée. Une viande parfumée,  légèrement collante sous la dent, d'une souplesse sans égale, avec un juste équilibre dans le sucré-salé, nous procure un plaisir continu qui déclenche ce geste du bras, celui qui va puiser les morceaux dans le plat, comme une sorte de toc mécanique, jusqu'à ce que le vide s'ensuive !
Et qu'il est agréable ce plaisir du contentement quand les restes du parfum des défunts sarcives continue de nous caresser la luette ! 
Parfum d'autant plus fugace que voici le civet de cerf. Et il va débouler comme chien roquet derrière poule-la-cour dans la cuisine de l'ailleule d'Ernestine.


Le gibier aux bois, d'importation, nous subodorons, plaide non coupable. Parce qu'à vrai dire il fallait avoir le palais fin pour distinguer sa saveur sauvageonne au milieu du tintamarre olfactif et gustatif du poivre et du girofle dosés à la sulfateuse. Oui nous l'avons quand même apprécié, nonobstant, poussant le vice masochiste jusqu'à laisser le rougail tomate nous rejouer Verdun 1916 dans ce déluge épicé. Nous renvoyons illico la blonde mauricienne réclamer un cessez-le-feu, ce qui permettra au gingembre-mangue du rougail de compter fleurette au civet le temps d'une bouchée. Une association non dénuée d'intérêt. Enfin, bon point pour les grains, très goûtus.
Une crème brûlée et un café viennent clore le repas avec une addition de 25 euros et des clous de girofle, tout compris. Très honnête compte-tenu de la qualité globale.

Kom' la Case, ou chez Nehoua, comme on voudra, est une adresse très prisée des Saint-Andréens, et nous ne leur en ferons pas grief. L'endroit est sympathique, on y est bien accueilli, et pour ce qui concerne les mets créoles, nous n'avons pas été déçus, malgré le manque de finesse du civet, qui n'était pas fait pour les chochottes. Pour ça et pour les sarcives divins, nous décernons à Kom' la Case une très jolie fourchette en argent.


Pour résumer : 
Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : perfectible
Service : bien • Qualité des plats : bons
IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT


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…, TOUJOURS PAS À LA HAUTEUR DE NOTRE ATTENTE !
[ par Louna Sanphi ]



Aujourd'hui nous nous sommes arrêtés à la Pointe des châteaux sur les hauteurs de Saint-Leu au seaview hôtel***Iloha qui comprend deux restaurants : la Trattoria et le kotémer, un salon-bar, un snack ou vous pourrez déguster des sandwichs et salades de 10h à 18h00, plus un glacier. Aujourd'hui nous visitons le Kotémer.

Nous arrivons à 12h30 nous nous garons dans le grand parking privé de l'hôtel arboré de magnifiques cocotiers et autres plantes luxuriantes. Nous sommes accueillis chaleureusement et on nous installe aussitôt sous le kiosque en bordure de piscine face à la vue imprenable que nous offre la baie de Saint Leu. Après avoir esquivé gentiment la carte des apéritifs à cause de cette dame Modération, nous passons directement à l'essentiel en choisissant un menu "grande fringale" qui est composé d'une entrée-d'un plat et d'un dessert à 27€. 
Aujourd'hui : Ananas Victoria et ses crevettes grillées, Côtes d'agneau sauce au poivre Quinoa et chou safrané ainsi qu'un méli-mélo de fruits frais. Nous prenons aussi à la carte un carpaccio de poisson frais mariné à l'aneth et un canard à la vanille-riz-grain-rougail. Après 20 minutes d'attente en regardant barboter les enfants dans la piscine et les agitations autour de nous, on nous apporte nos entrées.

Le carpaccio de poisson frais à l'aneth : 
L'assiette est généreuse. Le poisson, effectivement plein de fraîcheur et relevé d'une douce délicieuse sauce à l'aneth, est fondant. Tout est vite englouti après tant d'attente. Ce n'est pas grand hommage que nous lui rendons. 
Nous attendons encore qu'on nous amène nos plats, c'est trop dur ! Nous remarquons la présence de quelques Grands Raideurs venus se reposer à l'hôtel et qui font les 100 m dans la piscine. Nous avons presque oublié ce que nous avons commandé, quand 25 minutes pus tard arrivent les serveurs les bras chargés. Ils nous posent nos commandes sur la table sans aucune explication sur cette longue attente. 
Le canard à la vanille : 
La couleur et l'odeur sont présentes, en bouche le canard est tendre et plein de saveur, mais trop gras. Il baigne dans l'huile. Nous avions fondé de grandes espérances sur ce plat, hélas, il n'est pas au top ! Les haricots rosés sont très bons et crémeux, le riz jaune trop sec.  Le rougail, fade et pas pimenté, est plutôt dédié aux touristes. En revanche le piment vert est fidèle à lui-même.

Méli-Mélo de fruits frais : 
Nous attendons toujours et encore, nous interpellons un serveur qui nous explique que l'attente est normale car ayant pris un méli-mélo de fruits,  ces derniers sont préparés à la demande… mais tout de même ! Nos desserts arrivent. Nous apprécions la belle assiette pleine de couleurs : papaye, ananas, pastèque, fruit de la passion, raisins noirs que nous apprécions pour leurs fraîcheur, car il fait très chaud sous ce kiosque. 

Addition : 59 euros pour deux personnes. Compte-tenu de la qualité globale, c'est cher.

Au seaview hôtel*** l'ambiance est certes familiale et conviviale mais ce n'est pas pour autant qu'il faille se relâcher sur la qualité des plats. L'attente considérable n'est pas normale. 
Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : bien
Service : trop long • Qualité des plats : moyens
IMPRESSION GLOBALE : MOYEN
FOURCHETTE EN INOX



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Bon manzé dans La Caz, ça mi veut bien !

Aujourd'hui nous prenons la direction de la cité portuaire pour manger à La Caz. Sise rue Evariste de Parny, au 51, le restaurant est caché au fond d'une petite allée verdoyante et fleurie où l'on entre par un portillon garni des panneaux réglementaires (licences, moyens de paiement acceptés, etc.) plus deux autocollants du Petit Futé, datant de cette année et de 2012. Nous pénétrons dans l'antre par l'odeur alléchée, qui vient nous tournebouler avant que midi eût sonné.

Accueil souriant, alors que la salle est encore déserte. Nous nous installons et admirons. C'est coquet. Quelques objets anciens et des tableaux en guise de décoration, avec deux pathéphones qui n'attendent plus que leurs toutous, le faux plafond traditionnel et les lambrequins signent l'ambiance créole chic avec les tables tirées à quatre épingles.
Ici, point de carte, mais des plats du jour. Trois entrées et trois plats au choix pour nous : boudin créole, rillettes de thon, courgettes au basilic, puis romazava, vindaye d'espadon et steak de thon mi-cuit. Plus un cari la patte surprise. Va pour la patte cochon et le "roumazav", plus les rillettes et le boudin.
Avant d'embrayer sur la dégustation, un mot sur le service : impeccable du début à la fin. Amabilité, courtoisie, discrétion, suggestions... si on se souvient des règles que nous avons énumérées lors de notre dossier sur les arts de la table, avec les bons soins du lycée de la Renaissance, tout y est !


Rillettes et boudins sont dressés sur un lit de mesclun frais légèrement assaisonné, qui apporte tout de suite une note de primeur aux entrées. Les rillettes sont de thon et dans le ton, rafraîchissantes, mais salées comme la Mer Morte. Le boudin, pour sa part, est sans intérêt notable. Du boudin "la mie" standard, pimenté al dente pour le créole moyen, au goût passable.
Ça ne traîne pas, les entrées sortent, les plats arrivent, accompagnés de lentilles bien en crème à la bonne odeur de roussi, et de deux rougails, courgettes et tomates, correctement pimentés et pas trop salés (ouf!). Le riz est servi en quantité raisonnable, mais on viendra nous proposer du rab, quand on vous disait que le service est impeccable.


Offensive sur la patte cochon. Question viande, nous n'avons pas de chance : un seul morceau est digne d'intérêt, pour le reste, la peau et les os mais rien à dire. A la vue comme à l'odeur, déjà, c'est le genre de cari qu'on respecte, celui qui faisait soulever les chapeaux des messieurs saluant les bonnes cuisinières, dan tan lontan. Luisant, couleur or, avec une sauce réduite bien épicée, notre cari nous emballe le palais, avec sa peau glissante et souple aux humeurs lointaines de poivre et de thym, que vient équilibrer le rougail tomate avec sa petite claque acide. Plus le petit clin d’œil du persil, au hasard d'une canine.


Nous passons à l'abordage du romazava. Ce plat, assez rare dans les restaurants créoles, apparaît de temps à autre au menu du jour de quelques brasseries dionysiennes, dont celle au nom de l'aviateur moustachu né sous nos cieux. Quelle ne fut pas notre agréable surprise de le voir arriver, tout baignant dans sa sauce. Le plat, pas l'aviateur voyons ! L'odeur, déjà, nous fait voyager vers le pays des ravenales. C'est parti ! Première bouchée bien en sauce et les brèdes mafanes nous ratiboisent la glotte, nous carwashent les gencives, nous émoustillent les amygdales, nous électrisent les "lewres", nous profilaxent le glou et nous révolutionne les émonctoires.
Qu'est-ce qu'il fait chaud tout d'un coup ! L'acidité parfumée de la sauce, couplée au piment des rougails vient de nous envoyer un grand coup de tatane dans les glandes salivaires, pourtant déjà réveillées. Mais pas besoin de ça pour apprécier les morceaux de bœuf, gras juste ce qu'il faut, fondants, au goût charpenté, parfaitement à leur aise avec les feuilles de brèdes mafane effilochées. Oui, ça nous fait ça, le romazava. Et pour en avoir consommé des litres, nous pouvons juste déplorer une sauce pas assez abondante à notre goût, et peut-être un chouïa trop de sel, là aussi. 
Repos. "Vous voulez des desserts ?" nous demande la serveuse. C'est pas raisonnable mais oui on en veut. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour nos lecteurs !


Ce sera tarte tatin à la papaye et gâteau patate. La tarte est bonne, mais nous sommes un peu déçus. Les fines lamelles de papaye confites sont un peu éteintes au niveau goût. Nous eussions préféré de loin des tranches plus épaisses et plus sucrées, tant qu'à faire. Le gâteau patate est en revanche une bonne surprise. La présentation originale rappelle un fondant. À des années lumières du gâteau-comblage que nous nous fîmes servir par ailleurs, la pâtisserie est ici souple, toute molle dedans et à la vanille riante.
Bilan de l'opération : 50 euros pour deux personnes, sans les boissons. Étant donné la qualité globale, le cadre et le service, autant dire correct.

Treize heure aux horloges et la salle est presque pleine. Nous repartons repus. C'est le moins que l'on puisse dire. Dans son cadre charmant et ses dentelles, cachée de la rue comme une demoiselle effarouchée, La Caz cultive avec soin sa pudeur et son intimité, en vous faisant profiter de sa bonne cuisine traditionnelle. Si nous avons eu un peu maille à partir avec le sel, l'ensemble des plats de ce jour reflète une bonne maîtrise de notre gastronomie et de celle des îles de l'océan Indien, avec le respect des saveurs authentiques, le tout dans une certaine simplicité. Une bonne raison pour attribuer à La Caz une belle fourchette en argent avec recommandation de l'équipe.

Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : bien
Service : très bien • Qualité des plats : bons
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT
Recommandé par l'équipe


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[Par Louna Sanphi]

Aujourd'hui nous vous emmenons sur la plage de Boucan-Canot. C'est sur la terrasse du restaurant le Beau-Rivage que nous allons vous faire découvrir l'établissement et la cuisine haut de gamme du chef Vincent Lagrange 

Le chef 
Vincent Lagrange a fait ses classes chez des chefs reconnus tels que : Georges Blanc, 3 étoiles au guide Michelin, Bernard Ravet (Château-relais Ermittage) 2 étoiles au guide du même nom, ainsi que dans des établissements de renom dotés de 4 étoiles comme le Méridien à Nouméa, le Boucan-Canot et l'hôtel le Bellepierre sur notre île. Il s'est installé depuis 2007 sur la plage du Cap Homard à Boucan et dirige le restaurant le Beau-Rivage avec sa femme Virginie Lagrange qui assure l'accueil et le service en salle.

L'établissement et sa carte 
Facile d'accès avec son parking privatif, l'établissement est doté une cuisine extérieure et d'une  terrasse sur laquelle des tables entourant la piscine sont impeccablement dressées, un passage est dédié aux personnes à mobilité réduite, le bâtiment principal est une maison créole. Le restaurant le Beau-Rivage s'ouvre à sa clientèle sans avoir rien à cacher. Le chef et son équipe qui excellent sous nos yeux avec dextérité sont d'un calme exemplaire. Nous apprécions l'accueil parfait de naturel et de gentillesse de Grégory qui, comme son badge l'indique, est en formation de serveur. Il a su répondre à nos demandes et attentes avec professionnalisme. 
Le Beau-Rivage propose une carte avec des entrées et des plats allant de 18 à 48€. Vous trouverez aussi des menus dont les prix vont de 30 à 72€,ainsi que la formule déjeuner du mardi au vendredi à 25 et 30€. Récemment le Beau-Rivage à mis en place un service à l'emporter de 19,50 à 22,50€.

Le repas 
Pour notre première visite notre choix s'arrête sur la formule du midi à 30€ 
• Velouté de potiron au gingembre 
• Côte de porc rôtie aux épices avec Purée de patate douce 
• Café gourmand 
Nous optons aussi pour la "langouste des Terres Australes piquée de vanille gnocchis de pommes de terre et truffes fraîches", plat phare car le plus cher de la carte.

Le velouté de potiron au gingembre 
Superbe présentation, et d'une belle couleur orangée, onctueux et savoureux il est agrémenté d'une quenelle de crème fouettée légère à souhait, d'une petite tuile craquante. Le goût du gingembre n'altère en rien à la finesse et douceur de ce velouté.

La côte de porc rôtie aux épices avec purée de patate douce 
Présentation parfaite, cuisson maîtrisée en bouche c'est une explosion de saveurs : miel, cannelle, gingembre... cette sauce donne à notre porc péi une noblesse inattendue. La purée de patate douce, fine et légère telle une mousse est très appréciée, dommage: il n'y en avait que très peu.
Langouste des Terres Australes piquée de vanille et gnocchis de pomme de terre et truffe fraîche 
La belle dame arrive élégante tout de rouge vif vêtue sur son écume toute chaude, elle est charnue et goûteuse. On n'a pas senti le goût de la vanille peut être trop dominé par la généreuse julienne de truffes mais on ne va pas s'en plaindre ! Les gnocchis sont fondants bien lisses et savoureux avec le pain maison c'est purement un régal. Le Chardonay au verre accompagne très bien ce plat d'exception.

Le café gourmand 
Le café avec une mousse onctueuse, un macaron au thé et aux cerise, une tartelette aux fraises maison terminent cet excellent moment gustatif.

Total pour 2 personnes : 103 € + 2 verres de vin c'est  raisonnable pour de la haute gastronomie. 


Aujourd'hui le restaurant le Beau-Rivage nous à démontré que la cuisine gastronomique est à la  portée de tous car nous avons fait un très beau voyage culinaire, toutefois nous avons quelques remarques : bien que le panneau et la rampe l'indiquent les handicapés sont les bienvenus mais nous n'avons pas trouvé les toilettes leur étant destiné tout comme nous n'avons pas trouvé de coins destinés à ces dames, tout le monde sait l'importance de ces lieux. Le revêtement de la terrasse mérite un rafraîchissement. 

Le Beau Rivage

Tél : 0262 43 69 43 • www.lebeaurivage.re


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Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : moyen • Présentation des plats : très bien
Service : très bien • Qualité des plats : très bons
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT



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On est au mois de septembre et à Saint-Gilles, sur le coup de midi, la chaleur ressemble déjà à du décembre. Nous atterrissons au Balnéair, sur la traversante de la ville, en face de la BR, un petit snack qui n'en manque pas, d'air, et qui propose des salades à l'envi et des caris créoles. Ceux-ci font déjà bonne figure dans la vitrine des plats à emporter, et il y a du monde devant, aussi nous décidons-nous à prendre une table.
Le personnel est affairé mais fort souriant et aimable. Nous nous installons et commandons les rafraîchissements et les plats : le rougail saucisses et le civet de zourite du jour, préférés au cabri massalé et au poulet sarcives.
L'endroit, qui peut accueillir une trentaine de clients, est effectivement bien ventilé, et toutefois un peu bruyant, eu égard à la rue. On s'en accommode sans problème.  Ici on sert à l'assiette. Les caris ont déjà de belles couleurs. Le zourite est bien foncé, dans les tons rouges-noirs, comme de juste, et dégage le bon parfum de civet teinté de poivre. Il ne manque que du persil hâché pour que ce soit parfait. Première bouchée et notre impression est positive. Les chairs de « l'octopus » sont bien cuites, ayant gardé juste assez de résistance sous la dent pour montrer leur caractère, puis fondant en fin de compte en libérant l'inimitable parfum du clou de girofle jusqu'aux tréfonds de nos narines. La sauce est épaisse et délicieuse, et il y a comme un goût de pas assez.
Le rougail pour sa part  est ce qu'on pourrait appeler le rougail saucisses vulgaris. Tomates en boîte (à vue de nez), saucisses standards millésimées avec la peau qui rétrécit sur les bords et cette odeur de porc qui nous rappelle la cantine dans le temps, avant les cuisines centrales et les diététiciens de bureau, puis la préparation classique, dans les normes, où quelques fleurs d'oignons vaquent par-ci, par-là. Non ce n'est pas le rougail saucisses des hôtels quatre étoiles, succédanés de tradition pour touristes décérébrés. Non ce n'est pas le rougail saucisses bouilli, gras comme un bac de saindoux et sans saveur, servi dans les troquets douteux. C'est le rougail traditionnel de tous les jours, pas cher, et qui fait rêver encore la gente zoreille quand elle est rentrée dans ses frimas métropolitains. Et même les (rares) touristes anglophones s'y mettent ! Notre rougail saucisse réunionnais est une légende exotique comme celles que les marins se font tatouer sur le râble. C'est celui-là même qu'on a dégusté aujourd'hui, et il était peut-être un poil salé, s'il fallait vraiment chercher.
Tout cela était accompagné d'un riz correct mais peut-être pas assez copieux (c'est l'effet que ça fait quand les caris sont bons !), de pois du Cap bien jaunes et très parfumés et d'un petit rougail citron bien courtois avec le civet de zourite.
Café, une glace et l'addition : 27 euros et des poussières pour deux repas avec boissons. Autant dire correct pour Saint-Gilles !

Le Balnéair et son patron, Jean-Mathias Rocrou, régale les locaux et les touristes depuis 1996. Autant dire que pas mal d'eau à coulé sous le pont de la Ravine Saint-Gilles et l'établissement est toujours là, à vous recevoir avec une jovialité qui fait plaisir à voir. Un petit restaurant sans prétention comme il en existe partout dans l'île, et qui fait son bonhomme de chemin en proposant une carte assez variée et des plats traditionnels correctement exécutés qui contentent le palais. Ce bon moment passé lui vaut donc aujourd'hui une jolie fourchette en argent.

Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : bien • Présentation des plats : moyen
Service : bien • Qualité des plats : bons
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT



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Aujourd'hui nous grimpons vers la Bretagne, charmant quartier de Saint-Denis, où un petit restaurant vient s'ouvrir. Vous le trouverez sur votre droite après la station service, à l'angle du Chemin de la Grotte.

Un petit jardin potager, deux tables d'extérieur, une salle d'une trentaine de couverts, et, au fond, les alignements des plats à emporter avec la caisse, où, à 11h30 déjà, s'affairent deux personnes pour servir la clientèle des barquettes. La salle, simplement décorée, est propre, très agréable et ventilée. Les propriétaires ont eu la bonne idée d'y conserver un pied de letchis. Un jeune homme nous propose de nous y installer et vient prendre la commande.
Le menu, qui change tous les jours, est déjà affiché à l'extérieur. Aujourd'hui, c'est cari bichiques (bichiques déor, à ce prix là, c'est évident), steack porc à la chinoise, civet de canard, poulet aux oignons, camarons sauce d'huître, gratin aux légumes et un cari de poisson.
« C'est du vivaneau », nous précise notre serveur qui nous le recommande. Va donc pour le vivaneau et nous nous laissons également tenté par le porc à la chinoise.
Le temps d'apprécier un rafraîchissement nous remarquons que le défilé de clients vers les barquettes est de plus en plus soutenu. Certains repartent avec quatre, cinq, six plats. Les nôtres arrivent sans trop tarder.
Déjà, nous sommes positivement surpris par la quantité respectable de riz. Et le rougail tomate rouge vif attire notre regard. Nous le humons. Il sent bon la tomate des champs, le piment et le persil frais. Il n'en faut pas plus pour nous mettre les glandes salivaires au garde-à-vous.

Nous entamons le déjeuner avec le poisson. Déjà, ce dernier, du surgelé probablement, est au moins présenté en darnes, tout enveloppé d'une épaisse sauce rouge où l'oignon ne fait pas défaut. C'est déjà pas mal tant il est vrai que, par ailleurs, certains ont le culot de proposer à leur clientèle du poisson congelé en cube au goût de carton, en baptisant cela de la cuisine créole ! Ici nous sommes bien loin de ces médiocrités. Le poisson est savoureux. Il libère son arôme soutenu par un gingembre bien présent et le petit arrière-goût sucré de tomates mûres. La texture des chairs est fine, avec des arêtes en nombre limité, mais la sensation en bouche, farineuse sur la fin, trahit une cuisson peut-être poussée au-delà du maximum syndical (par inadvertance supposons-le), sans pour autant que cela devienne désagréable.
Le porc pour sa part est souple, tendre, d'une belle couleur luisante et nous offre des saveurs sucrées-salées où la sauce d'huître a semble-t-il côtoyé d'autres aromates, dégageant le parfum un peu piquant des sautés déglacés aux alcools d'anis.
Il s'entend à merveille avec notre rougail frais, fleurant bon la tomate la cour, celle qui a du goût, et pas les vulgaires tomates gonflées d'eau que nous servent régulièrement les supermarchés.
Le riz est correctement cuit. Les pois du Cap sont assez équilibrés, pas trop en grain, pas trop en crème, et très satisfaisants au palais. Nous terminons notre déjeuner par un gâteau d'ananas maison. Une petite pâtisserie familiale fort goûtue quoiqu'un peu dense peut-être, et joliment présentée.
Nous repartons repus, avec une barquette de civet de canard, pour le soir.
Nous réglons 27 euros et des poussières pour trois repas dont un à emporter, un dessert et deux boissons. C'est notre portefeuille qui est content.

Si d'aventure vous passez par là, le Resto de la Bretagne, tout nouveau, vous propose de la bonne cuisine traditionnelle créole et chinoise. Vu les prix, ne vous attendez pas à des produits haut de gamme, mais le talent du chef accommode magistralement l'ordinaire pour vous laisser la satisfaction qui vous fera revenir. On ne s'y trompe pas : à midi et demi, c'était plein. Il est donc préférable de réserver si vous comptez passer un bon moment entre midi et quatorze heures. A trois minutes en voiture de la Technopole, voilà une sympathique adresse à conserver dans son agenda. Et c'est avec grand plaisir que nous décernons au Resto de la Bretagne une bien jolie fourchette en argent.


Pour résumer : 
Accueil :  bien • Cadre : bien • Présentation des plats : bien
Service : bien • Qualité des plats : bons
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT



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Le Baril
[Visite en août 2013]

Aujourd'hui nous voilà partis vers le joli quartier du Baril, à Saint-Philippe, pour mettre les pieds sous la table du restaurant du même nom. « L'hôtel-restaurant » devrions-nous dire, en cours de rénovation de ses chambres, "par boute" comme dit le créole. 

A notre arrivée nous constatons que la salle aussi aurait besoin d'un rafraîchissement, mobilier compris.
En effet, le style général fait vieillot. La grande pièce de plus de 130 couverts sent la moisissure. Son seul intérêt étant les baies vitrées donnant presque directement sur la falaise et les vagues qui s'y brisent. En préambule de cette visite, nous avions été consulter le site de l'établissement (www.lebaril-reunion.com) qui est pour le moins à l'image du lieu : pas très glamour dans sa présentation, et, fait notable, présentant un encart « tripadvisor » où l'on peut lire les avis d'internautes étant passés par là. Le moins que l'on puisse dire, c'est que la direction du Baril n'est pas rebutée par la critique ! Ou alors elle s'en fiche complètement, parce que certains internautes y ont le verbe sévère. 
Nous avons donc voulu nous faire notre propre opinion sur la cuisine cet établissement qui compte parmi les plus anciens de l'île et qui eut en son temps une réputation non surfaite.
On nous accueille avec sourire et politesse. Nous nous plaçons près de la baie vitrée, pour profiter de la vue. Si l'endroit est fatigué par les ans, la  vaisselle est propre, c'est déjà ça. La carte est créole, pour l'essentiel… Nous passons commande d'un gratin de citrouille au jambon et crevettes, d'une assiette créole classique avec les fritures traditionnelles, puis d'un cari ti-jacques boucané et d'un cari canard-maïs, un couple hélas rare au menu de nos restaurants et qui fleure bon la tradition.
Sans crier gare, et sans plus de commentaires, la serveuse nous dépose quatre beignets en guise d'amuse-bouche, et pfuiit, passez muscade, file à ses occupations. On ne saura pas ce que c'est, sinon que cela avait un vague goût de je ne sais quoi, du pimpin, peut-être, écrasé par celui de la friture…
Parlons maintenant des entrées.
D'abord, le gratin de citrouille "au jambon et aux crevettes". Il faut bien chercher les crevettes. De toute manière, il vaut mieux parler d'un gratin de béchamel parfumé à la citrouille, et encore, tant le cucurbitacée fait pâle figure, en quantité comme en saveur. De plus le fromage du dessus a un peu trop brûlé et a coulé sur les bords du ramequin. Ça fait négligé, d'autant que l'affaire est un peu froide, un peu chaude, « par place ». La note finale va être gratinée aussi, on le sent comme ça.
Les fritures créoles étaient mangeables mais passablement insignifiantes. Aucune originalité dans la présentation, une humeur de cumin dans les samoussas, puis le néant gustatif.
Déjà mal disposés, nous entamons les plats de résistance par le canard accompagné du maïs. Le plat est, autant le dire tout de suite, sans intérêt. La viande filandreuse et d'une pâleur sépulcrale n'a aucune espèce de tenue. La sauce est claire comme de l'eau, et en bouche les saveurs sont en veilleuse. Rien à voir avec le goût franc du collier au fumet incomparable d'un cari canard traditionnel exécuté dans les règle de l'art. Le "fameux" poulet certifié "la cour" présent à la carte sous-entendait-il les origines moins fermières de l'anatidé ?
Ce n'est pas la présence du maïs qui changera quoi que ce soit. Celui-ci est en effet aussi pâle en goût que le cari, et servi dans le plat par agglomérats collants, sans le moindre souci de faire bonne figure.
Le cari ti-Jacques boucané pour sa part est un scandale. Il a été oublié au feu, visiblement. L'ensemble est archi-roussi. Cela se voit déjà à l'oeil nu et la dégustation ne laisse aucune place au doute. Le ti-Jacques imprime une amertume trop présente sur la langue, retirant toute valeur à la préparation. Le boucané en lui-même est mangeable mais sans plus. L'ensemble suinte le gras jaune d'une huile bas de gamme chargée de safran­­­­. Rien à dire sur le riz, servi en grande quantité, ni sur les pois du Cap et les lentilles, standards.
Nous arrêtons le carnage (et les frais !) en ne prenant pas de dessert (crème brûlée, banane flambée, tutti et quanti). Total de l'opération 51,50 euros pour deux personnes, soit un peu plus de 25 europar tête. Un peu cher vu la qualité de l'ensemble. 

Non, nous ne vous dirons pas que la cuisine du Baril, c'est du bidon, ni autre billevesée du même tonneau. Nous ne vous dirons pas non plus de ne pas y aller… au contraire. Il se peut que vous tombiez sur un bon jour, et que le chef soit de bonne composition. Parce qu'aujourd'hui, en cuisine, c'était du grand n'importe quoi. Mitonner des plats, arranger un semblant de présentation, tout cela était le cadet de leur souci.   Autant dire que vu la concurrence qui pousse (et poussera) dans les alentours, telle la mousse sur les laves (et que nous visiterons tantôt), il y a de toute façon quelques questions à se poser sur le Baril. La dégustation de ce jour leur valant, hélas, une fourchette en plastique. Fermez le ban.

Pour résumer : 
Accueil :  bien • Cadre : moyen • Présentation des plats : aucune
Service : moyen • Qualité des plats : très moyens
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : MÉDIOCRE
FOURCHETTE EN PLASTIQUE

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Voilà, nous reprenons le cours normal des critiques sur ce nouveau blog à partir d'ici. Dommage que ce soit avec une fourchette en plastique.


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Le restaurant du Cap
[Visite en juillet 2013]

Un pique-nique au bord de l’eau, ça vous dit ? Par ce beau samedi ensoleillé, nous partons pour une balade sans but précis, et finissons par arriver dans la bourgade Sainte-Marienne de la Rivière-des-Pluies, où les habitants vaquent à leurs occupations de ce début de week-end, qui chez la coiffeuse, qui au marchant de légumes, qui en recueillement à la Vierge noire. Nous stoppons devant le Restaurant du Cap, juste à côté de la station service, à quelque distances du vieux pont en venant de la Technopole.


Trois tables et quelques chaises, la vitrine où sont présentés les plats du jour, l’armoire à boisson, quelques glaces et la caisse : nous sommes dans un de ces petits restaurants de quartier sans prétention, propre et bien entretenu. Quatre personnages s’activent, en uniforme blanc, toqués et rasés de frais, pour servir avec dextérité et sourire la clientèle qui défile. Entre les voitures qui arrivent et qui repartent, les caris qui changent de contenant et le sonnant et trébuchant à la caisse, tout à l’air d’être parfaitement huilé comme à la chaîne de montage. Au menu ce jour : sauté de porc, poulet au chouchou, massalé cabri, poisson au gingembre et les quasi-incontournables sauté de mines et riz cantonnais. « Trois, à emporter s’il vous plait » : le massalé (l’un de nos plats phares avec le cari de poulet qui nous sert souvent de mètre étalon), le poisson (dont la couleur orangée nous interpelle) et le sauté de porc. Le menu de la semaine entière est affiché de toute façon, pour savoir ce qui vous attend, ou ce que vous avez raté, selon le jour.
Nous voilà repartis les glandes salivaires au taquet, vers les berges de la rivière-des-Pluies, via la route grimpant vers Moka. A deux ou trois cent mètres après la dernière maison, nous trouvons un charmant espace de verdure, propre à part un vieux moteur désossé qui traîne dans un coin, et de toute évidence prisé des pique-niqueurs si on en juge par les foyers depuis longtemps refroidis répartis sur le site. À quelques dizaines de mètres en aval, le doux son continu de l’eau courante se superpose au silence. Plus haut, un bras de rivière asséché, où vient mourir une pelouse encore humide, nous dégage la vue des hauts de Sainte-Marie. Nous nous installons sous un grand filao, et, après un bon bol d’air frais, entamons les hostilités. Nous ne sommes pas les seuls à avoir faim, les moustiques aussi (si vous y allez, prévoyez en conséquence).
Le sauté de porc exhale tout de suite ses parfums de cuisine chinoise poivrée, entre Siave et sauce d’huître, avec des légumes tranchés menu en fin de croquance. Les morceaux de viande ne sont pas gras du tout, et bien moelleux. La dose de sel est correcte. L’affaire se situe, gustativement parlant, entre le shop-suey et le porc sauce grand-mère.
Le massalé est dans les clous. Bien parfumé aussi au déballage, avec présence des feuilles de caloupilé. La viande est tendre, presque trop à vrai dire, tout ça manque un peu de tenue à la vue mais demeure parfaitement correct au palais. Le massalé a de la personnalité, assisté de ce petit piquant acide qui va bien. Il eut été mieux arrangé avec un rougail concombre bien fouetté au piment vert, qu’avec le rougail Dakatine de rigueur aujourd’hui.
Le poisson au gingembre tient la route également. Le « Zingiber officinale créolitum » (gingembre la cour quoi !) ne nous agresse nullement tout en étant bien affirmé. Le poisson en passerait presque au second plan si ce n’était la petite touche sucrée réglementaire, qui, associée à la douce épaisseur de la robe enfarinée des morceaux, nous rappelle le légendaire poisson au gingembre de feu le Ti-couloir, à Saint-Denis, dont les moins de 20 ans se fichent comme de leur première barquette.
Le sauté de mine est passé à la trappe. Un « ti’guine » trop salé celui-là, et comme glutamaté plus que de raison et bien trop gras à notre goût. Mais certains doivent aimer, s’ils le vendent. Les mines exceptées, donc, les autres barquettes sont proprement nettoyées, et le tout pour 20 euros avec deux boissons. Nous nous dégourdissons les jambes dans ce joli petit coin de verdure, en nous disant que finalement tout cela serait bien descendu avec un baron bien connu localement, frais, n’en déplaise à ses détracteurs, avec la mère Modération et deux ou trois joueurs de dominos, comme ça.


Bonne note pour l’équipe du Restaurant du Cap, qui fait valser les barquettes depuis bientôt dix ans du côté de la Rivière-des-Pluies, avec constance et sa cousine régularité, au vu du nombre de personnes qui défilent, l’hypothalamus déjà soulagé à la vue des caris étalés sans pudeur. Au passage, ce n’est pas parce qu’on sert des plats à emporter qu’il ne faut pas soigner la présentation. Un peu de déco culinaire (une feuille de persil par ci, une rondelle de citron par là) égayeraient un peu les bacs ! Nonobstant ce chipotage, nous gratifions Le Restaurant du Cap d’une fourchette en argent.

Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : moyen • Présentation des plats : buffet
Service : bien • Qualité des plats : bons

NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE


FOURCHETTE EN ARGENT





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Chez Jo
[Visite en juin 2013]

C'est par un beau samedi ensoleillé que nous trouvons un Manapany riant, avec son front de mer au puissant chant de vagues à faire baver les surfeurs, ses résidences coquettes pelotonnées contre la pente raide, et son bassin de baignade à l'eau claire qui, par ces temps, ferait le bonheur de touristes norvégiens. Juste au-dessus dudit bassin, Chez Jo est ouvert. Et nous avons décidé d'y mettre le nez, les papilles et le reste, histoire de voir si la réputation dont jouit cet établissement dans le sud est justifiée.



Comme à notre habitude nous débarquons tôt, et sommes accueillis avec sourire et amabilité par le personnel, et aussi avec les couleurs des plats à emporter qui attendent le client à l'entrée. De quoi achever de nous mettre en appétit après la petite promenade aux embruns que nous venons de faire.
Bon signe déjà, la carte est serrée : 8 salades dont deux « géantes » (pour 13 euros) et 7 plats, dont deux créoles (rougail saucisses et cari zourite) : entrecôte grillée, magret de canard, fricassée de poulet aux pleurotes, entre autre.
Les plats du jours sont sur l'ardoise du fond. Ce jour : rôti de porc aux brèdes chouchous (des brèdes, alléluia!), espadon à la chinoise, émincé de bœuf au gingembre, filet de cerf ou salade de palmiste au foie gras poêlé pour les fins gourmets.
Le rôti nous plaît bien, et nous testerons aussi les cuisses de canard à la vanille, pour voir. Mais avant d'attaquer les plats nous ouvrons le bal avec quelques samoussas au jambon-fromage, des accras et des bonbons piments. Nous notons que du jus de goyavier frais est proposé comme rafraîchissement.
Les amuses-bouches créoles sont servis dans un vanne et nous apprécions l'effort de présentation, tout en déplorant que tout cela soit un peu froid, un petit passage au four n'aurait pas été de trop.
Rien à dire pour autant sur le goût. Les samoussas au fromage ne sont pas notre tasse de thé, mais ils sont bien dodus et savoureux.

Les choses sérieuses arrivent vite, servies à l'assiette. Les portions sont conséquentes et la présentation est simple mais soignée.
Parlons d'abord du canard. Ici, « canard » rime avec « standard ». Rien d'extraordinaire en effet. La sauce épaisse, d'une belle couleur foncée, est légèrement sucrée-salée comme nous nous y attendions, mais la saveur de vanille est lointaine. Trop lointaine. Sur ce genre d'exercice, le dosage est capital : trop de vanille tue le plat, en risquant de le rendre un peu écœurant, et le cuisinier a semble-t-il préféré jouer la prudence. D'autre part la viande elle même manque de corps allant jusqu'à être légèrement sèche. Rien de dramatique pour autant. Le plat est correctement réalisé.
Le rôti est d'un autre niveau. La viande a ce caractéristique parfum de fumé-cramé, où flottent le poivre et le thym, avec de belles couleurs miel. En bouche, les chairs sont d'une souplesse magnifique, tendre comme une fiancée qui sent l'amour, et les lentilles avec leur bonne odeur de roussi safrané l'accompagnent judicieusement.
Un mot sur les brèdes chouchous : un peu trop cuites à notre goût, et donc avachies dans l'assiette, elles sont quand même très bonnes, avec un sel bien dosé et le petit piquant d'ail qui va avec. Et c'est très bien de mettre des brèdes à table, nous n'en voyons pas assez dans les restaurants soi-disant créoles que nous visitons. Tout cela est parfaitement soutenu par un très bon rougail tomate claque-zoreils, où le piment vert donne de la voix.
Nous terminons avec des desserts par pure conscience professionnelle, car il ne reste guère de creux à boucher. Il le faut bien, ce sont des desserts « maison ». Nous vous laissons le café gourmand, la tarte tatin et la mousse au chocolat, préférant une crème brûlée à la vanille et un tiramisu.
La crème brulée, tiède, est une douceur lactée exquise, au fondant incomparable. Le tiramisu, tout de mousse et de crème vous donnerait l'envie d'y mettre la tête toute entière pour peu qu'il soit dix fois plus gros, c'est tout dire !
Nous repartons comblés, au sens physique du terme, après avoir réglé une addition de 48,50 euros, soit un peu plus de 24 euros par personne (sans les boissons) ce qui, en regard de la qualité globale, de l'accueil et du cadre, nous paraît honnête.


Chez Jo, endroit charmant dans un coin charmant, vous propose une cuisine variée et très correcte, dans un cadre sympa. Du sauté chinois au foie gras poêlé, il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses. Du reste, on ne s'y trompe pas : à 13h, il restait peu de tables libres parmi la centaine de couverts disponibles, en comptant l’extérieur. Grand coup de chapeau au personnel, qui, malgré le monde, a assuré le service avec célérité. De très bonnes raisons pour décerner à l'équipe de chez Jo une très jolie fourchette en argent, avec recommandation spéciale !

Pour résumer : 
Accueil : bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : bien
Service : très bien • Qualité des plats : bons


NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE

FOURCHETTE EN ARGENT






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Le Relais du Maïdo
[Visite en mai 2013]

Aujourd'hui nous prenons la direction du Maïdo, dans le sillage de notre fringuant randonneur Alain Dupuis, sorte d'elfe des forêts parcourant les monts et les vaux de notre belle île (sans collant vert ni chapeau pointu, Dieu merci !) qui nous a proposé ces dernières semaines une randonnée sur le bord du rempart. Nous ne sommes pas allés si haut, mais nous sommes arrêtés quand même dans les hauts des hauts, au royaume des trois « B » (Boeufs, Bois, Brouillard), au Relais du Maïdo et ses animations touristiques dont la luge qu'on ne présente plus. D'ailleurs, l'ancienneté des installations commence à se voir, il est vrai que l'humidité ambiante ne doit rien arranger. La grande salle tout en bois, elle, est confortable et chauffée par des poêles, l'ambiance est donnée.


Ce dimanche, c'est buffet pour les plats créoles, mais il y a aussi des plats plus « métros » à la carte (souris d'agneau, escalope d'espadon, rumsteck, magret de canard). Nous aurons donc, pour 17 euros, le choix de ne pas choisir entre le porc aux olives, le bœuf bourguignon, la cari de poisson (du grenadier) et le civet de coq, mais de tout goûter. En entrée, quelques crudités et un gratin sont au garde-à-vous. L'accueil est chaleureux et souriant. On nous installe, on vient prendre notre commande de boissons, et l'on s'enquiert de nos desiderata.
Nous décidons de tester les amuses-bouches salés qui consistent en diverses fritures classiques, plus une originalité du terroir : des beignets de poulet au géranium. Nous irons ensuite voir le buffet. Les samoussas, servis par lot de 3, à 2,50 euros, reviennent à un peu plus de 80 centimes pièce. Sachant qu'un samoussa se négocie dans « les bas » à 40 centimes prix public d'achat, la marge n'est pas mal, ils ont intérêt à être bons. Et ils le sont : farce fine et parfumée, pas gras.

Les beignets de poulet sont bons aussi et l'humeur de géranium est intéressante, tout en évitant d'être trop entêtante. C'est le plaisir d'essence. Mais nous ne décelons guère le goût de poulet, écrasé par celui du fromage qui compose le beignet. "Poulet" est sans doute signalé à l'adresse des personnes ne mangeant pas de boeuf ou de porc pour des raisons religieuses... Cette entrée en matière nous ayant à peu près satisfaits, nous fonçons vers le buffet ventre à terre. Nous n'y retournerons pas.
La salade de crudités fraîches, accompagnée d'une vinaigrette réussie, ni trop acide ni trop salée, est coupée presque en cheveux d'ange. Le résultat est un plaisir à la mastication et une belle odeur de choux et de carottes, de la bonne vieille salade classique et efficace. Place aux plats.
Nous allons être brefs. Le cari de porc aux olives est d'une banalité navrante, et les olives ne l'aident que peu. La viande est farineuse et peu goûtue.
Le cari de grenadier fait de la résistance, on ne peut pas trop lui en demander. Mais il aurait pu au moins être accompagné d'un piment vert « crasé » au caractère plus affirmé que le rougail « zognon » disponible au buffet. Globalement, c'est fade.
Le civet de coq est une véritable insulte. Déjà la viande est liquéfiée et les saveurs normalement franches et épicées d'un civet catholique (laurier, clou de girofle et vin) n'ont qu'une existence vaporeuse. Tout cela est mangeable mais ne nous amène que du regret. Ce ne sont pas les desserts qui nous consoleront. Une crêpe froide et un gâteau «ti son», dont il manque un peu de peau du dos (oser servir cela au client c'est du je-m'en-foutisme caractérisé). Le nom est un peu surfait. Disons que c'est un quatre-quart au lointain parfum de ti son, dont la texture épaisse fait dire au créole : « gâteau comblage ». Un verre d'eau là-dessus et ce n'est plus un dessert, c'est Bob l’Éponge.
Tout ça pour 41 euros et des poussières, sans l'apéro, soit un peu plus de 20 euros par tête de touriste.
Aurions-nous dû goûter aux plats à la carte ? Sans doute, parce que le buffet, lui, à l'instar de quelques autres que nous avons pu tester par ailleurs, est de piètre qualité.
Ce n'est plus un mystère : la formule buffet permet aux restaurateurs de faire un maximum de chiffre avec des dépenses serrées. De là à servir du rata de temps de guerre en déguisant cela en cuisine "exotique", c'est se moquer ouvertement de la gastronomie réunionnaise. Tout cela sent la fourchette en plastique à plein nez.
Seconde dégustation
Aussi avons-nous décidé de donner une deuxième chance à ce restaurant qui est en première ligne sur le front du tourisme réunionnais. Nous avons voulu savoir comment étaient les plats à la carte et sommes retournés les tester quelques jours plus tard. Nous remarquons d'emblée que les plats métro « du jour » sont les mêmes que précédemment. Des plats du jour qui restent plusieurs jours... cela voudrait dire qu'ils n'ont pas été vendus ou qu'ils ne changent pas ?
Nous commandons le cari de poisson, de l'espadon nous annonce-t-on, et la fricassée créole estampillée spécialité maison, à base de charcutailles diverses et de bringelles.
Le poisson qui arrive, servi à l'assiette, est de l'espadon... en cube ! Pourquoi ne sommes-nous pas surpris ? Le plat est mangeable, loin s'en faut, mais très ordinaire. Un anglophone dirait :"cheap" !
La fricassée se défend un peu mieux. Des petits morceaux d'andouilles assurent le goût pour l'essentiel, encore qu'à minima, et les bringelles presque fondues confèrent au plat une certaine homogénéité de texture, tout en accompagnant la viande du mieux qu'elles peuvent gustativement parlant. Rien d'extraordinaire au final. Et le rougail tomate, formaté pour les palais sensibles, est parfaitement inintéressant. Seul le morceau de gâteau de patate douce fait mieux que le pitoyable « ti son » servi trois jours auparavant, bien qu'encore trop dense.
Globalement, les plats à la carte sont un ton au-dessus de ceux du buffet, mais c'est timide. Rien de tout cela ne nous a emballés.

Le Relais du Maïdo est une cantine. Allez-y si par malheur vous avez oublié le pique-nique, ou si mémé est tombée en panne de gaz en pleine cuisson du civet de canard! Vous aurez la satisfaction d'avoir l'estomac plein, et guère plus. Dans un endroit comme celui-là, c'est quand même dommage. Vu le potentiel touristique évident, dire que nos visiteurs se font servir de la tambouille cuisinée avec des produits de bas de gamme, c'est un véritable gâchis ! Le Relais du Maïdo récolte donc une bien généreuse fourchette en inox !

Pour résumer : 
Accueil : très bien • Cadre : bien • Présentation des plats : buffet / moyen
Service : bien • Qualité des plats : très moyens


NOTRE IMPRESSION GLOBALE : TRÈS MOYEN

FOURCHETTE EN INOX





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Le Latanier
[Visite en mai 2013]

Grand-Bois. Ce quartier de Saint-Pierre au passé sucrier, il n’y a pas si longtemps encore enquiquiné par les embouteillages, est en pleine mutation. Un établissement a connu toutes les transformations de ce tranquille village puisqu’il y propose le gîte et le couvert depuis plusieurs décennies, niché au bord de la côte rocheuse comme un paille-en-queue, au souffle des alizés. Il s’est appelé Demotel, puis Océan Maloya, et se nomme aujourd’hui Le Victoria. C’est son restaurant, le Latanier, que nous passons à la moulinette.



Visiblement l’hôtel a bénéficié récemment de certaines améliorations concernant l’accueil et le confort de la clientèle, même s’il reste encore à faire. Il en résulte que le restaurant, qui peut accueillir 70 personnes, est coquet, apaisant et très convivial.
Convivial aussi est le personnel qui nous reçoit. Par cette belle journée ensoleillée, nous nous installons à la terrasse qui fait face à la piscine autour de laquelle quelques épidermes blanchâtres de touristes tentent de bronzer. Des cocktails nous sont proposés, nous choisirons un « ti punch » pour nous fouetter les gencives et un jus de fruits frais. La carte est assez restreinte, mais, comme nous le confirmera le chef à la fin du repas, tous les produits sont frais.
Quatre entrées, poissons et camarons, quelques viandes et deux caris créoles au menu : rougail saucisses et cari de poisson. Ce sera donc rougail saucisses et filet mignon de porc, pour nous. Nous entamons les hostilités avec une salade de chèvre chaud « pané cornflakes et miel coco » plus une salade de palmiste.
Cette dernière nous surprend agréablement. En effet, outre une présentation soignée, le palmiste coupé en morceaux hétéroclites se trouve très correctement assaisonné. C’est rare. Nous avons assez maugréé contre ces assaisonnements trop citronnés qui tuaient la saveur subtile du cœur de palmiste. Ici nous avons une sauce toute en finesse, à l’huile d’olive, qui nous emballe le palmiste et ses accompagnements avec délicatesse, un vrai plaisir pour le palais.
Le chèvre chaud ne fait pas moins bien. Le fromage, sage comme une image (presque trop), crémeux et épais, avec un panage croquant et savoureux qui amène d’entrée de jeu l’humeur sucrée et parfumée du miel, est un délice sacré pour berger à biques. En finale il nous laisse comme une guillerette saveur de noisette. Nous terminons les entrées avec le plein d’émotions gustatives, et la suite nous est amenée dans la bonne humeur et la célérité.
Le filet de porc, un chouïa cramé aux entournures, sous ses dehors bruts de décoffrage et un peu secs, s’avère goûteux et souple en bouche, rappelant avec moult civilités sucrées-salées les atouts parfumés de son cousin rôti créole. Au bal du cochon, le filet est accompagné fort à propos par une magnifique daube de citrouille veloutée, cucurbitacé au caractère affirmé que, le diable nous patafiole, nous rencontrons trop rarement aux menus de nos restaurants créoles, à part quelques gratins par-ci, par-là. Un risotto rafraîchissant apporte au couple porc-citrouille son cachet « exotique » (pour nous) et tout à fait original. Au même bal, voici le rougail saucisses. Des saucisses fumées, coupées en tranches fines, toutes habillées d’une sauce bien rouge comme une seconde peau, mais qui n’étale aucune huile dans le fond du plat. Elles sont savoureuses, sèches mais pas trop, et portent à nos sinus la nostalgie des bons rougails au feu de bois des familles, simples et appétissants, des saucisses reines des piques-niques avec leurs zembrocals de maris ! 100% top créole. Dans toute cette affaire, le sel est savamment dosé, et Dieu sait si nous sommes tatillons sur le sujet. Nous regrettons simplement le rougail concombre un peu faible, tant en quantité qu'en puissance.
Les caris laissent la place au dessert : une tarte tatin à la papaye confite fraîcheur orange sanguine. La papaye, crue ou cuite, est, il est vrai, notre péché mignon. Nous n’en sommes que plus exigeants à son sujet. Cette papaye-là n’est peut-être pas la meilleure que nous ayons dégustée, nous la préférons un peu plus dure et plus collante, mais elle est tout de même très bonne, et son goût caramélisé est sublimé par le contraste de la glace acidulée et surtout par la menthe fraîche. Nous laissons une feuille de menthe collée à la paroi d’une joue, diffusant sa tonicité en continu tandis que la papaye, la glace et la chantilly se mélangent : un bonheur !
Addition : 76 euros pour deux personnes. Ce n’est pas donné, mais au regard de la qualité des plats, nous nous estimons satisfaits. Pour information les formules du jour vont de 15 à 20 euros (aujourd'hui une grillade de thon et du mérou frais qui sentaient bon l'iode et la marée).






Le Latanier est ouvert depuis septembre 2012 à l’hôtel le Victoria de Grand-Bois. Il vous propose une carte de petits plats amoureusement préparés à base de produits frais. Si vous êtes amateurs de poissons, c’est une adresse à conserver. On vous y reçoit avec simplicité et gentillesse, dans un cadre bucolique où vous trouverez paix et sérénité. La cuisine est de haut niveau, pour l’aperçu que nous en avons eu, et le jeune chef, qui n’est plus un « bleu », y met tout son savoir-faire et sa passion. Une cuisine simple, à la présentation soignée, qui fait honneur aux produits locaux, en mariant à merveille plats traditionnels créoles et standards métropolitains. Une carte qui va se renouveler sous peu, gageons qu'il y aura encore de belles surprises en perspective.  Nous sommes repartis ravis, en leur décochant au passage une très jolie fourchette d’or.

Pour résumer :
Accueil : bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : Très bien
Service : très bien • Qualité des plats : excellents 
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : TRES BONNE TABLE
FOURCHETTE EN OR

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Note août 2013 : C'est le Chef du Latanier qui nous a appelé, répondant à l'annonce qui paraît avec la rubrique. Bien entendu nous ne lui avons pas dit quand nous viendrons. Nous avons attendu deux mois avant de nous y rendre. Et c'est la première fourchette d'or de cette année !

Commentaire Août 2014, par Christelle : "C'était cher on le savait au départ, et franchement il y a vraiment du laissez aller dans ce cas. Le buffet d'entrée c'était bof, rien d'original, un truc vite fait qu'on peut tous faire chez soi (i vaut pas les oeufs mimosa de ma belle mère) ... j'ai pris un carry d'espadon et mes hommes un rougail saucisse fumées, les gros pois étaient hyper salés, rougail saucisse trop salé aussi et un peu gras, le carri espadon manque de goût et d'épices et tant qu'au buffet des desserts (mon dieu seigneur) c'était franchement pas bon du tout, je n'ai pas un super palais mais quand je dis que c'est pas bon ben ça ne l'est pas. Les tartes choco et coco : on dirait du surgelé (pâte pas croustillante, toute molle), l'espèce de truc qui ressemblait à un tiramisu avec une fraise dessus qui était un peu passé, pas de goût fait avec une crème pâtissière un peu de cacao et hop envoyé c'était pas bon, un gâteau dont je n'ai pas trouvé le parfum (je me suis demandé si c t pas un gâteau do lo) : génoise baignant dans son sirop sans goût avec une crème pâtissière pas bonne (ça existe encore ce genre de gâteaux ?), un gâteau péi dont je n'ai pas réussi à trouver ce que c'était : hyper sec, baignant dans un truc qui ressemblait à une crème anglaise avec plein de sirop sur le dessus. Bref, on s'est dit ça vaut une fourchette en plastique, on aurait dû aller manger chez Jo à manapany ..."

Et vlan !  

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L'Auberge Créole
[Visite en avril 2013]

Quelques semaines après notre passage à Sainte-Anne, aux Trois orangers, vous voici de retour dans ce quartier de Saint-Benoît, à l'église fameuse et repeinte, mais empestant hélas la moisissure à rendre malade les allergiques (Mais que font les responsables de cet édifice ?) Nous ne nourrirons donc pas nos âmes ici, aujourd'hui, mais il n'en ira pas de même pour notre corps, qui, midi tapante, réclame sa pitance. Justement, presque en face il y a l'Auberge Créole, au fond d'une allée. L'endroit, pittoresque, donne sur la grande plage de galets. Le bâtiment semble avoir bénéficié de quelques rénovations et aménagements, mais il reste beaucoup à faire pour rendre l'endroit accueillant. Le potentiel est énorme.


Nous sommes accueillis par un personnel souriant et sympathique, et nous nous installons à une table non loin de la baie vitrée qui donne sur une grande terrasse en caillebotis ouvrant elle-même sur le rivage. Nous y respirons l'air marin à plein nez, avec ses embruns consécutifs à une mer agitée. Des embruns qui n'épargnent pas les baies vitrées d'ailleurs : elles sont sales. Les chaises aussi ont subi les assauts salins : les pieds en fer sont attaqués par la rouille. Pas top. Un remplacement du mobilier ne serait pas du luxe. La salle est taillée pour les réceptions, mais ce midi une trentaine de couverts attend les clients.
Une jeune demoiselle fort accorte nous emmène la carte. Grosse carte (ce qui n'est pas forcément un bon signe). Zoreil, créole, chinois, et des pizzas : on sait tout faire à l'auberge créole, qui devient du coup l'auberge internationale !
Nous faisons notre choix en sirotant un excellent punch coco maison, « préparé avec amour », nous fait le serveur, qui nous détaillera la composition de l'affaire. Nous notons à notre surprise grande que la demoiselle sus citée prend la peine de nous remplir les verres. Ça c'est du service ! Nombreuses sont les fois où on nous a juste déposé les canettes sur la table, sans même les ouvrir !
En entrée, nous testerons du foie de volaille poêlé et un gratin de chouchou, que suivront un cari canard fumé et un cari poulet palmiste.

Et ça commence pas trop mal. Le gratin est passable, avec des morceaux de chouchous assez fermes sous la dent, et dont la saveur délicate n'a pas été écrasée par le fromage fondu. La béchamel a été dosée à l'économie, mais ce n'est pas désagréable et le plat ne s'en trouve que plus léger.
Le foie de volaille assure aussi, avec son petit arrière-goût de vinaigre, dans son lit de salade à l'assaisonnement raisonnable en sel (un miracle!). Idéal pour préparer nos papilles à l'arrivée du canard fumé. Les entrées sont prometteuses. Mais après...
Après nous avons droit à deux caris plutôt réussis, dans l'absolu, mais pour le moins standards. Le poulet palmistes nous en met pourtant plein les sinus, dans sa sauce convenablement épicée, mais qui s'avère assez grasse par ailleurs. La viande pour sa part est sèche, même les morceaux « de choix » comme la cuisse, et ne nous procure aucun plaisir. Les larges tranches de palmistes ont bu le fond de sauce et sont goûteuses mais en revanche filandreuses. Même affaire pour le canard fumé, dont, a priori, on pardonne plus volontiers le côté gras : Le cari canard n'a pas pour réputation d'être un plat léger. La viande, là aussi, est assez sèche et le côté « fumé » est un peu en berne. Ce qui est fort dommage.
Les deux plats nous laissent assez dubitatifs. Si la préparation des caris, le dosage des épices, la couleur de la viande et l'odeur de roussi nous semblent conformes aux canons de la cuisine créole authentique, l'ensemble au final n'est pas à la hauteur de nos espérances. C'est un peu éteint. Est-ce la qualité des volatiles, qui n'ont certes pas dû être trucidés de la veille, ou alors l'huile utilisée ? Toujours est-il que les caris nous resteront sur l'estomac jusqu'au lendemain, lourds comme des enclumes.
Le riz s'avère être peu ou prou le même que celui dont nous a affligé l'Ambéric il y a quinze jours, à la différence près qu'il est ici mieux cuit et sans odeur de vieux ! Côté accompagnement : les lentilles baignent un peu dans la flotte, en compagnie de quelques haricots ; le rougail tomate est quant à lui très satisfaisant, dans le taux de sel comme dans le dosage du piment.
De l'ananas frais sera notre dessert, bien sucré et parfumé comme il sied à notre Victoria.
Addition : 72 euros et des embruns pour deux personnes, en tout et pour tout, avec un café, soit 36 euros par tête de yab. Et la note de rejoindre le canard sur l'estomac !

L'Auberge créole, ou internationale, bénéficie d'un emplacement en or, pour le moment pas exploité à fond, mais cela est certainement dans les projets des responsables. Vous y trouverez un accueil chaleureux, un service plus que correct et une salle en partie de bois habillée s'ouvrant sur l'océan, idéal pour les mariages, baptêmes, et autres réjouissances familiales saisonnières.
Pour ce qui est de la qualité de sa cuisine, l'Auberge créole est dans la moyenne, et nous avons longtemps hésité sur la note finale. Nous avons quand même été un peu déçus par la tournure des plats de résistance. Nonobstant la lourdeur relative des caris, imputable peut-être aux viandes et à la qualité de l'huile utilisée (si nous pouvons nous permettre d'oser quelques conjectures) l'ensemble manquait de « punch », comme des plats ayant perdu leur saveur au congélateur et au micro-onde. Nous n'avons donc d'autre choix, pour le moment, que d'attribuer à l'Auberge Créole une fourchette en inox, même si l'argent n'est en définitive pas très loin.

Pour résumer :
Accueil : très bien • Cadre : perfectible • Présentation des plats : moyen
Service : très bien • Qualité des plats : moyen


NOTRE IMPRESSION GLOBALE : MOYEN

FOURCHETTE EN INOX





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L'Ambéric
[Visite en avril 2013]

Après toutes les recommandations que nous avons eues au sujet du restaurant l'Ambéric, au Tampon, dont certaines dithyrambiques, notre curiosité est allée grandissante. « Cuisine créole au feu de bois » peut-on lire sur l'enseigne indiquant l'entrée de l'établissement, niché au creux d'un lotissement verdoyant en plein Trois-Mares. Un paradis pour jardinier.


Passer le portail de l'Ambéric, c'est un peu comme rentrer « chez d'moune ». Le jardin est magnifique, et la salle d'une quarantaine de couverts ne l'est pas moins. Propre, classe, richement décorée, tirée à quatre épingles. On nous a proposé la varangue donnant sur le jardin. Il fait beau, les oiseaux chantent. Nous nous installons, quelque peu surpris par la paix régnant en ces lieux et par les chaises créoles traditionnelles, raides comme la justice. Un silence rassérénant, mais à la longue un peu pesant quand même. Une douce musique d'ambiance n'aurait pas été de trop.
Au-dessus de nos têtes, des plantes grimpantes ont fait un toit. C'est plutôt sympathique, mais un petit filet tendu pour retenir les résidus de feuilles mortes permettrait de protéger les tables, et les plats ! Puis nous repérons un pied de verre ébréché. Dans un endroit classe comme celui-là... c'est le détail qui fait tâche, comme le pet d'une nonne en pleine messe. Nous cessons de chercher la petite bête quand la carte nous est déposée.

Sauf erreur, point d'entrées à la carte. Celles-ci sont annoncées de vive voix par le sympathique chef de rang (ou maître d'hôtel) qui s'occupe de nous et consistent en un gratin de bois de songes, une salade de palmiste, et des larves de guêpes (pour les amateurs). Va pour le bois de songe, déjà.
 C'est la liste des grands classiques pour les plats de résistance, avec un civet de queue de bœuf, comme plat sortant de l'ordinaire. Cela va des rougails saucisses et zandouille au cari de canard en passant par le civet de zourite et le boucané baba-figue, sans baba-figue aujourd'hui puisque remplacé au pied levé par de la papaye. La bonne nouvelle c'est que les brèdes sont de la partie, c'est assez rare pour mériter d'être noté. Les tarifs s'étagent entre 13 (pour une omelette créole) et 29 euros pour la queue de bœuf. Nous nous décidons pour un cari la patte cochon et un rougail zandouille. Point de jus de fruits frais pour nous désaltérer. Hélas. Nous nous rabattons sur du tout venant de multinationales. Le service est rapide. La seule autre table occupée nourrit deux personnes débarquées en même temps que nous. Après des amuses bouches, des feuilles de patates douces et des beignets de fruit à pain accompagnés d'une sauce au céleri et à la menthe pas vilaine du tout, les gratins sont servis chauds. Ils sont très bons, mais allez savoir pourquoi, nous leur trouvons un goût dominant de sauce de cari la patte ! Le bois de songe a peine à s'exprimer dans cette avalanche d'épices, mais les gratins sont sifflés quand même.
Voici l'andouille : Coupée en tranches d'un centimètre, la charcuterie ne s'est pas effondrée à la cuisson. Normal, elle est composée essentiellement de viande entrelardée, à tendance plus sèche que grasse. Les tranches ont les pieds dans une jolie sauce d'un rouge appétissant. Peu ou pas de tripes composent l'affaire, et cela se sent tout de suite en bouche. Nous cherchons vainement le goût tonique et un peu fermenté caractéristique de l'andouille créole comme la sœur Anne. Rien. L'andouille se défend avec ce qu'elle a, et cela reste très correct par ailleurs, d'autant que la dose de sel est acceptable et que les humeurs poivrées se font discrètes. Mais cela manque justement un peu de « punch », ce que du piment vert aurait pu apporter. Il y a des plats comme ça, à l'instar du poisson, que les palais créoles préfèrent relevés « in utero », en plus de l'apport des rougails.



Voici la patte cochon : de beaux morceaux à la couleur luisante, cuivrée, avec presqu'autant de viande que de peau. Le plat est conforme à nos attentes : rond, onctueux, salé comme il faut, avec le caractère franc des épices roussies en partie dans le gras fondu des morceaux et dans une sauce épaisse et parfumée au lointains airs de quatre-épices. Ce plat, qui a ses adeptes qui ne jurent que par lui, ne déçoit pas. Il se marie particulièrement bien avec le rougail margoze, dont l'amertume particulière contrebalance avec justesse le côté un peu épais de la patte.
Les rougails, parlons-en : Margoze, dakatine (pilée maison s'il vous plaît), bringelles, tous corrects. Des grains bien en crème et parfumés, un sauté de chou et des brèdes chouchous accompagnent les plats. Les brèdes sont pas trop mal, bien que la cuisson soit sujette à caution : pas assez croquantes à notre goût, mais très bonnes par ailleurs pour tout-un-chacun. La quantité en revanche pèche franchement. Il aurait fallu au moins un bol par cari. Quitte à mettre des brèdes, autant en profiter pour équilibrer un peu l'assiette par un apport conséquent de végétal non ? Mais nous ne boudons pas notre plaisir... nous les apprécions à leur juste valeur, le peu qu'elles sont.
Par contre, nous sommes loin d'apprécier l'ingrédient principal de toute agape créole bien née : le riz. En effet, celui qui nous est servi est raide (comme les chaises!), sec, bien en grain mais un peu trop, pour le coup, et sent le vieux. C'est la deuxième fois cette année. Il est regrettable que des restaurateurs ne fassent pas plus attention à leur riz ! C'est la base quand même ! On a comme l'impression qu'on essaye parfois de fourguer aux gens du riz de second choix pour marger un maximum. La transition est toute trouvée pour parler de l'addition, les desserts, classiques, ne nous ayant pas tentés.
78 euros pour deux personnes, apéritifs, entrées, plats et cafés. Très cher. Un peu exagéré même. Vous venez à quatre et vous prenez du bon vin et des desserts, vous en avez pour près de 200 euros ! Un prix que la qualité des plats ne justifie pas, si l'on se base sur ce que nous avons dégusté. 
L'Ambéric, à Trois Mares, 7 ans d'existence, nous a fait découvrir aujourd'hui une cuisine correcte, respectant la tradition créole, mais de manière un peu aseptisée, comme pour satisfaire de la clientèle affectant les endroits feutrés et les jardins entretenus au fil à plomb et taillés au millimètre. Joli jardin d'ailleurs. Ces dehors bon-chic-bon-genre cachent quelques imperfections : un pied de verre ébréché, un service perfectible au regard des règles de la profession (mais cela ne compte que peu dans la note finale de cette rubrique), et une cuisine qui semble ronronner un peu, d'où sortent quelques mets peu courants et des plats (encore) de bon niveau mais pas exceptionnels. Pour l'Ambéric, aujour-d'hui, si le silence de son jardin est d'or, la fourchette est d'argent. Pour information, l'Ambéric a reçu la distinction de « Maître Restaurateur » de la préfecture en 2011.


Pour résumer :
Accueil : bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : moyen
Service : bien • Qualité des plats : bons 
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT 



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Les 5 orangers
[Visite en mars 2013]

La camionnette 404 des Dijoux quitte le petit village de Sainte-Anne en fumant comme l’usine de Bois-Rouge pendant la coupe. Au volant, Iréné se fait enguirlander par Marie-Berthe, qui vitupère au sujet de l’antique véhicule. « Un jour out’ vieux cariole i sa laisse a nou su l’bor d' la route, cosa ou attend pou change a lu ? »

A l’arrière, Ernestine et ses frères jouent aux cartes. Par cette belle journée, la famille s’en va pique-niquer au pont de la rivière de l’Est. 

La camionnette arrive au niveau du lieu-dit « Les Orangers », c’est alors qu’Iréné devient tout pâle.

- Kosa l’arrive à vous ? Vous la vu bébète ou koué ? lui fait sa femme.

- Heu, mon ti caille… prend pas la colère… mais… mi crois que mwin la oublié la marmite cari su la tab’ la cuisine.
Un hurlement aigu de truie qu’on égorge fait s’égailler les oiseaux à deux kilomètres à la ronde.
Reprenant son souffle, Marie-Berthe repère le resto-snack « Les 5 orangers », sur la gauche. Iréné lit le panneau : « repas 5 euros, à zéro mètres ».
- Oté, ban’na i aime kass les kui ici !, rit-il.
- Ben nou va voir si zot cari lé bon, répond Marie-Berthe, qui espère que son pique-nique sera sauvé du naufrage. « Ernestiiine ! », crie-t-elle à sa fille.
- Voui ma mère !
- Vient trap la monnaie et allé rod barquettes a ter là, avant qu’mi touf ’ le mimite out’ papa !

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C’est ainsi, par une journée ensoleillée, que nous atterrissons au "5 orangers", repéré il y a belle lurette lors de nos pérégrinations. Le resto-snack n’est guère plus qu’un container-bar amélioré d’une terrasse avec des parasols publicitaires colorés aux emblèmes d’une mousse à la face de volatile disparu. A l’intérieur, une dame et une jeune fille s’activent et nous reçoivent gaiment, en symbiose avec le soleil de midi qui donne à cet écrin de verdure une ambiance de vacances.
Au menu du jour, parmi les nombreux sandwichs, un cari de pintade, un sauté de porc aux gros piments, omelette créole et steak haché-frites. Les deux premiers nous conviennent parfaitement. Nous nous installons à la terrasse, plus grande que nous le pensions, capable d’accueillir une trentaine de clients. Sous les parasols, il fait un peu chaud, et la proximité de la Nationale nous dérange au début, mais ces inconvénients sont  très vite oubliés, au profit de l’indéniable charme bucolique des lieux. Notre attention est de toute manière vite mobilisée par les assiettes qui nous sont servies.
A vue d’œil, nous trouvons déjà la quantité de riz un peu limite pour un estomac de bon mangeur. Les grosses lentilles ont une belle couleur claire dans leur sauce épaisse et les caris ont également bel aspect. 
Le porc est une surprise. Nous nous attendions à trouver des émincés avec des gros piments coupés fin, à la chinoise. Que nenni ! A la place nous avons des beaux morceaux entrelardés, légèrement dorés, côtoyant des gros piments coupés large. Et tout cela est très bon ! Le porc est un peu gras, certes, mais tellement souple et savoureux, dégageant en finesse un petit arôme sucré, comme s’il avait été flambé en vitesse avec un fond de rhum blanc. Les gros piments sont croquants à souhait et accompagnent la viande judicieusement.
La pintade par sa couleur bien dorée, révèle une cuisson au croûtage expert où les épices ont imprégné la viande de leur saveurs. Sous la peau délicieuse, la viande un tantinet sèche du volatile apporte du tonus sous la dent sans être désagréable. Il est vrai que les morceaux sont coupés en justes proportions, ce qui a permis à la sauce de bien tremper tout ça. Thym, poivre et l’amertume subtile d’un déglaçage chronométré au fumet incomparable contribuent à prolonger notre plaisir non feint à la dégustation du plat. Les lentilles sont également très bonnes et veloutées, baignant un riz tendre mais pas trop. Tout cela est magnifié par le petit rougail citron vert, odorant et puissant, apportant sa touche pimentée et un vrai rayon de soleil gustatif sur la pintade avec laquelle il flirte plus volontiers qu’avec le porc. Il ne manque plus que des brèdes pour que ce soit parfait.
Un gâteau de patate, joliment  présenté, vient clore ce repas. Et il est magnifique. Du gâteau maison, à la patate apparemment écrasée à la fourchette, comme en attestent les petits morceaux qui viennent éclater sous les molaires. La juste dose de sucre met davantage en relief l’humeur douce de la vanille. La légèreté de ce dessert est proportionnelle au plaisir que nous avons de le déguster.
C’est déjà terminé. Addition : 21 euros, pour deux boissons, deux repas, un dessert et un café. Rapport qualité-prix imbattable !
Sur les pentes grimpant vers le pont de la rivière de l’Est, la 404 fumante des Dijoux a repris sa route, et Ernestine n’a pu résister à la tentation d’ouvrir une barquette pour humer son contenu. La petite famille ne sera pas déçue. Et nous ne l’avons pas été non plus.


"Les 5 orangers" régale sa clientèle depuis deux ans. Il ne lui faudrait pas grand-chose pour atteindre les sommets gustatifs. C’est en tout cas de la bonne cuisine familiale et authentique, bien de chez nous.  Oui, aux "5 orangers", on mange simple et bon, dans un endroit plein de charme, en compagnie de gens sympathiques. La famille Vergoz vous met tout de suite à l’aise, sans ronds de jambes et sans chichis. Après le repas vous pourrez toujours demander à siroter un petit rhum letchis qui nous a fait un clin d’œil sur le comptoir et, si vous avez la même chance que nous, une papangue en chasse viendra vous dire bonjour en planant au-dessus du champ d’en- face. L'établissement se voit donc récompensé d’une très belle fourchette en argent, bien méritée, avec recommandation de l’équipe.

Pour résumer :
Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : bien • Service : très bien
Qualité des plats : très bons
NOTRE IMPRESSION GLOBALE : TRÈS BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT 

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Note août 2013 : Avec les 5 Orangers nous inaugurons la distinction "Top Créole".



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Le Vetyver
[Visite en mars 2013]
Ce restaurant affichait "cuisine créole et métro". En fait de cuisine créole, il n'y avait qu'un seul plat, préparé ailleurs et réchauffé sur place. Ce jour là c'était du poisson congelé en cari. Inutile de vous dire que vu le goût, fade, et l'aspect, s'il avait fallu le noter sur ce plat, ce restaurant aurait pris une fourchette en plastique direct ! Mais nous avons aussi goûté des plats métros, et c'était plutôt bon. Nous lui avons donc attribué une fourchette en argent, sans omettre la remarque au sujet du poisson. Le gérant nous a appelé, pas content, nous reprochant la dureté de nos écrits. 
Etant donné l'esprit de cette rubrique, s'il fallait employer le vocabulaire des Bisounours, autant arrêter tout de suite. Nous disons la vérité telle qu'elle est. Mais cela n'a pas plut au monsieur qui s'est montré désagréable et un brin moralisateur.
De la morale, nous pourrions aussi en faire : qualifier ouvertement son restaurant comme "créole et métro" est de la pure malhonnêteté quand on se contente de proposer UN SEUL plat créole au menu. Déjà. Et pas bon en plus. Par dessus le marché.
Nous avons donc décidé de ne pas republier ici sa critique et de ne pas le faire apparaître sur la carte des meilleurs restaurants. 


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Le Colorado
[Visite en février 2013]

Aujourd'hui nous partons pour le Colorado, à la Montagne, paradis des pique-niqueurs en goguette, des amoureux, et des familles nombreuses, avec ses grands espaces verts et son parc de jeux dont raffole la marmaille. Nous arrivons sur le parking du restaurant "Le Colorado" sous des trombes d'eau (encore!) à ne pas mettre un canard dehors. Le restaurant a l'air fermé, malgré le panneau "Restaurant ouvert" et nous allons nous réfugier sous son porche, comme des naufragés dans une tempête, qui collent au radeau.

Nous sommes accueillis avec surprise. On ne nous attendait pas, et pourtant, nous avions réservé la veille. Le message n'est pas passé, visiblement. Pas sérieux. Heureusement, il y a de la place, et tout juste à manger. On nous prévient que les caris du midi, aujourd'hui, se réduisent au nombre de deux, un rougail saucisses et un massalé cabri. Ah bon ?
Le menu change tous les jours. Et ce soir, c'est fête. Le restaurant est en effet coutumier des repas de groupes pour les occasions les plus diverses. Qu'à cela ne tienne, vu le déluge, et l'heure, pas question de redescendre à Saint-Denis. Nous nous contenterons des deux caris disponibles et on nous place sur la terrasse, qui profite d'une belle vue, et où 50 couverts sont dressés, en plus des tables à rallonge qui attendent les convives du soir, à l'intérieur.
A notre demande ("vous avez des entrées ?"), on nous sert une entrée de fritures créoles diverses : samoussas, nems, beignets bringelles, sur un lit de laitue et de tomates, avec de la vinaigrette industrielle. Après la dégustation du punch maison bien parfumé, nous attaquons.
Pas grand-chose à dire. Les fritures sont bonnes, mais pas extraordinaires. Les samoussas et les nems sont fourrés au fromage. L'un ou l'autre aurait pu être farci d'autre chose, quand même, parce que là, à part la forme, on ne voit pas bien la différence entre les deux. Les beignets de bringelles sont assez réussis, bien qu'un peu gras. Les beignets de crevettes sont au-dessus du lot. 
La salade verte est à pleurer. A la décharge du restaurant, il n'est sans doute pas facile de trouver de la bonne salade en ce moment, mais celle que nous avons dans notre assiette n'a ni goût ni sentiment, autant manger de l'eau. Les caris arrivent peu après dans des marmites. Nous saluons l'effort de présentation, même si c'est du vu et du revu. 
Le rougail saucisses est moyen. Des saucisses fermes, moyennement grasses, moyennement salées, trempant dans une sauce étique et moyennement bonne. Du rougail saucisses de camion-bar. 5 euros.
Le massalé de cabri est aussi décevant. Et il l'est d'autant plus que nous fûmes accueillis par l'odeur caractéristique de la poudre de massalé en train de chauffer, ce qui nous avait fait saliver. Là, les saveurs du massalé sont atteintes d'autisme. En bouche, elles laissent parler d'abord le sel avant de révéler timidement leur existence, "je voudrais surtout pas déranger, faites comme si j'étais pas là." Les feuilles de caloupilé sont aux abonnés absents, et la viande elle-même est un poil farineuse, comme un cabri grabataire qui aurait cuit depuis la veille. Si c'est du cabri pays, ça, il est pas né d'hier. Un mot sur les grains : du petit calibre pour la chasse aux cailles. Bien secs ! Premier prix au rayon "tôles" des supermarchés.
Les desserts enfoncent le radeau. Une mousse au chocolat et une crème brûlée qui ont visiblement pris un bon congé sabbatique en chambre froide, et dont le réchauffage, pour la seconde, a été fait à la vitesse de la lumière. Qualifier cette pâte compacte que nous avons sous les yeux de mousse au chocolat ce n'est plus de la mauvaise foi, c'est une farce ubuesque ! Quant à la crème brûlée… on va dire tout simplement qu'elle ne fut pas bonne du tout, en vous passant les détails, autant par charité chrétienne (c'est carême) que par égard, cher lecteur, pour votre estomac ! Nous ne pouvons faire autrement que de signaler l'infâmité de la crème au personnel, et le responsable présent aura la courtoisie de nous la retirer de l'addition, et la mousse avec, en nous disant : "Nous sommes preneurs de toute critique, cela nous permet de nous améliorer." Ils sont servis !
Tarif : 50 euros pour deux personnes (sans les desserts). Vu la qualité, c'est cher. Très cher. Le genre d'addition qu'on a un peu en travers des amygdales !

Voilà donc un restaurant bien placé, dans le parc verdoyant du Colorado, on peut dire aux premières loges des endroits touristiquement fréquentés, jouissant de surcroît d'une réputation certaine, nous a-t-on laissé entendre, et qui fait pâle figure ce midi, avec une cuisine plus que moyenne. Nous avons l'impression d'être mal tombés. Nous osons espérer que le chef et son équipe se décarcassent un peu plus que ça pour leurs convives du soir, et que ceci explique peut-être cela (sans l'excuser, bien sûr). Mais il nous vient alors une question : pourquoi ce restaurant, en définitive pas très loin de Saint-Denis est-il si souvent déserté le midi en semaine, comme nous le confirme le responsable présent ? Est-ce là la conséquence d'un choix délibéré de privilégier les repas de groupe ? En ce cas, au lieu de servir aux gens des plats aussi piètres que ceux que nous avons dégustés, pourquoi ne pas fermer tout simplement le midi ? Disons-le tout net, la prestation du Colorado, ce jour, n'est pas au niveau. Et les desserts ont bien failli faire tomber la fourchette en plastique. L'accueil et le service sont corrects, les caris juste mangeables, nous attribuons donc au Colorado une fourchette en inox, à prendre comme un signal d'alarme.

Pour résumer
Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : passable
Service : bien • Qualité des plats : très moyens 

NOTRE IMPRESSION GLOBALE : TRES MOYEN
FOURCHETTE EN INOX 

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Note août 2013 : La gérante est descendu jusque dans nos locaux, furieuse, beuglant et braillant sans nous en laisser placer une, réfutant le peu d'argument qu'elle nous laissait avancer, faisant preuve d'une mauvaise foi caractérisée, et finissant par nous insulter.


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Le Faham
[Visite en février 2013]








Salazie. Nous grimpons vers l'empire des chouchous sous la queue de Felleng. Inutile de vous dire qu'il pleut comme peu de vaches peuvent pisser. Après une légère accalmie, le village trempe dans une atmosphère gorgée d'humidité. Peu de monde dehors, à part quelques touristes dégoulinants. Le charme de la bourgade n'en est guère plus altéré, bien au contraire. Notre cible était le Petit bambou, face à l'église, mais c'est fermé. Nous nous rabatons sur le Faham, deux cent mètres plus bas, face à la Poste.

Le Faham est un hôtel restaurant d'une douzaine de chambres, sans étoile pour l'instant, mais qui fait bonne figure. La grande salle à la déco classique expose une quarantaine de couverts espacés où l'on est à son aise. L'accueil est souriant et un peu pressé. Nous avons à peine le temps de jeter un œil à la carte qu'on vient aussitôt nous demander ce que l'on veut manger, mais pas si nous souhaitons boire quelque chose. Nous commandons quand même le punch maison. Ce dernier est un tas de sucre. Un vrai sirop.
La carte propose des plats créoles habituels, quelques-autres chinois (shop-suey, bol renversé, mines), et même des omelettes et des pâtes. Nous optons pour le menu du jour : un ti-jacques boucané et un cari de crevettes, assortis de boudin au achard et d'un gratin de chouchous en entrées. Ces dernières sont inégales. Le boudin est sec et pâteux, pourtant il fleurait bon le sang frit, le poivre et le cochon en bonne santé. Pas terrible. Par-dessus le marché l'achard, très croquant au demeurant, est beaucoup trop salé. Le gratin de chouchous rattrappe le coup. Légume coupé en petits morceaux qui a une bonne odeur de thym ; du sel bien dosé (ouf) ; l'abbé Chamel et sa bénédiction onctueuse ; le fromage fondu, collant, au goût magnifique qui sait respecter celui du chouchou tout en vous laissant son piquant dans les gencives. La suite arrive vite.
Le cari de crevette, dans sa sauce orange foncé assez épaisse, est délicieux. Les crustacés ont gardé le bout de leur queue, pour plus de saveur, ce qui nous donne une bonne excuse pour en extirper le jus, en essayant de limiter les bruits de succion pour garder un peu de contenance. Le piment vert “crasé” que nous avons dû réclamer, et à juste titre, emporte le plat à deux niveaux supérieurs et nous emporte la bouche avec, déclenchant nos larmes masochistes.
Le cari de ti-jacques est pareillement fréquentable, bien qu'un peu sec (mais ce n'est pas entièrement de sa faute, nous le verrons dans un instant). Du ti-jacques frais et odorant battu maison, assez tendre, et au bon goût de fumé communiqué par un boucané civilisé, pas trop gras, et pas trop envahissant. La portion étant un peu légère, nous en commenderons une seconde. Le troisième convive pour sa part disparaît littéralement derrière son bol renversé, un monticule conséquent, qui sent bien bon l'œuf frit et le siave. Nous ne le goûterons pas, ayant assez à faire avec deux plats.
Seule ombre au tableau : la qualité médiocre du riz blanc. Ce dernier est convenablement cuit mais c'est du bas-de-gamme aux brisures nombreuses, et d'une platitude navrante. En bouche, il enlève toute dignité au pourtant respectable cari ti-jacques. Les grains blancs sont ordinaires. Nous ne touchons pas au rougail servi, sorte de melting-pot de plusieurs légumes pimentés, lui préférant de loin notre tortionnaire piment vert ! Nous terminons par un fondant au chocolat avec sa glace vanille, très bons.
Addition : 64 euros pour trois touristes, boissons comprises, avec un dessert et deux cafés, soit 21 euros et des gouttes de pluies par personne. Un rapport qualité-prix acceptable.
Le Faham propose au cœur du village de Salazie un cadre confortable, à la décoration un peu convenue, dans lequel on déguste une cuisine créole correcte mais qui manque d'originalité, ne serait-ce qu'au niveau de la présentation des plats (mais c'est hélas assez courant ailleurs). On nous a précisé catégoriquement que le service n'allait pas au delà de 14 heures, contraintes de personnel sans doute. Nous ne regrettons pas notre passage, nous étant convenablement sustentés, nonobstant un riz médiocre, à proscrire quand on prétend recevoir, surtout pour la clientèle touristique. Une visite qui nous fait décerner au Faham une fourchette en argent juste, tout juste !


Pour résumer :

Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : perfectible • Service : moyen

Qualité des plats : bons


NOTRE IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE

FOURCHETTE EN ARGENT 




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RETOUR AU QG
[Visite en janvier 2013]


Le mois dernier, à l'occasion de l'une de nos tournées, nous surprenons la conversation d'une cliente assise à deux mètres de nous, la cinquantaine pomponnée et le petit doigt en l'air, qui déclarait en substance, sur un ton du plus parfait mépris :  « Je ne comprends pas que les créoles aillent manger créole dans les restaurants, c'est vraiment de la paresse ! ». Sur le fait, nous eussions de loin préféré la surdité plutôt qu'ouïr un tel monceau d'âneries. Mais cette personne ne connaissait visiblement pas le QG.
Testé en 2011, ce restaurant de La Plaine-des-Cafres situé à Bourg-Murat sur la route du volcan, avait récolté une très injuste fourchette en argent. C'était en effet le premier d'une longue liste, et nous ne voulions pas décerner d'entrée la fourchette d'or. Cette nouvelle visite était donc prévue depuis longtemps, compte-tenu des nombreuses remontées que nous avons eu de la part de clients pour le moins satisfaits.
En presque deux ans, le cadre, très roots, s'est largement amélioré, un mélange réussi de Réunion et d'Afrique qui se traduit aussi dans la musique d'ambiance où le kayamb côtoie le balafon. La cheminée est toujours là, offrant la douce chaleur de son feu aux arrivants, avec ses andouilles « pendillées » !
Installés tout près, nous taillons une bavette avec Abdou qui, comme à l'accoutumée, nous annonce la carte et prend les commandes de tête. Il faut dire qu'Abdou n'est pas n'importe qui. Ce grand Sénégalais a fait la connaissance de sa yab de femme à Nice, alors qu'il travaillait au Novotel. Et question standing, l'homme pourrait vous en conter.

Cari de coq, cabri massalé, cari la patte cochon, rougails zandouille et saucisses sont toujours au menu, avec quelques plats métro, dont des moules marinières que nous nous ferons un plaisir de goûter. Sachant ce qui nous attend, nous ne prenons pas d'entrées. Rupture de stock en revanche sur le civet gourmand, visiblement très prisé, trio de langoustes, de camarons et de noix de Saint-Jacques ! En attendant l'arrivée des plats, nous sirotons un punch maison à base de fruits frais, très léger, avec la modération circonstanciée. De la cuisine toute proche nous parvient le parfum caractéristique des épices qui ont chaud aux fesses, et « not' bouche i fé d'leau ! » Puis les moules font leur apparition, et les caris suivent de près.
Les papilles émoustillées, nous attaquons le coq. L'emblème français n'a pas perdu de son tonus. La superbe cuisse se laisse déguster en se déshabillant lentement comme une playmate ! Un coup de dent à l'os certifie d'un lignage racé qui a dû faire frémir nombre de poules « la cour ». Nous poursuivons avec le cari de porc dans sa peau moelleuse enrobé. Si le plat nous semble manquer un peu de « réduction » au niveau de la sauce, l'ensemble est assez conforme à nos souvenirs : parfumé et bien collant comme cela doit être, avec des reflets de miel d'Acacia.


S'il est un plat qui vous révèle tout de suite l'excellence d'une cuisine créole, c'est le rougail saucisses. Le plat référent, s'il doit y en avoir un. En effet, déjà pas facile de trouver de bonnes saucisses. Il y a souvent du trop ou du pas assez : trop grasse, trop ou pas assez sèche, pas assez épicée, trop salée, trop moulue... Alors quand vous trouvez un bon charcutier, vous le gardez ! Au QG, ils ont trouvé. Les saucisses sont un modèle d'équilibre à tout point de vue, et dans leur belle sauce rouge toutes leurs épices contenues vous chantent leur créolité en bouche, avec le délicieux riz Basmati et ses longs grains, avec les crémeux et très odorants pois du Cap et la touche fortissimo du piment vert « crasé ». 
 Pour finir, nous quittons la tradition créole pour une incursion dans le Nord-Pas-de-Calais, avec les moules marinières. Des moules dodues comme Juliette avant Roméo, fleurant bon le vin blanc, l'iode et la marée, accompagnées des bonnes vieilles frites qu'on oubliera finalement tant les mytiloïdes étaient goûtues. Quelques respirations plus tard, on nous apporte les desserts : crème brûlée et bananes flambées. Le contraste de saveur, après les moules, profite à la banane, dont le sucre un peu caramélisé nous laisse sur la longueur sa douceur fruitée accompagnée d'une légère acidité très agréable. La crème brûlée est bien tiède, veloutée et nous envoie son parfum de vanille bien de chez nous en guise de point final à ce plantureux repas.
Addition : 81 euros, hors boissons, pour quatre, soit une vingtaine d'euros par tête de yab, avec cette qualité-là !
Bon. Oubliez tout ce que vous venez de lire. A vrai dire, cela ne sert à rien. Pourquoi ? Il y a deux ans, l'équipe du QG aurait pu avoir une fourchette d'or. Vous croyez qu'ils en ont besoin ? Que Nenni. Quand on a atteint ce niveau, à l'exemple de tous les autres restaurants bien notés que nous avons testés, pas besoin de titre de reconnaissance. Le bouche à oreille est et demeurera la principale publicité, la plus authentique, celle qui vous remplira les salles ou les videra. La salle du QG est remplie. Et tous les jours. Le QG est plus qu'un restaurant, c'est un peu chez soi, un peu d'ailleurs. Le QG se vit. Si vous, créole, qui adorez la cuisine de votre grand-mère ou votre mère, vous voulez lui faire le plaisir de mettre les pieds sous la table, pour une fois, vous l’emmènerez dans la fraîcheur de Bourg Murat, aux bons soins d'Abdou. Que peut-on ajouter ? Allez : une fourchette d'or ! Méritée depuis longtemps. Avec nos plus sincères remerciements et nos encouragements à Abdou et toute sa joyeuse compagnie afin qu'ils puissent continuer ainsi pour bien des années encore !

Pour résumer :
Accueil : très bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : bien • Service : très bien
Qualité des plats : excellents

NOTRE IMPRESSION GLOBALE : TRES BONNE TABLE
FOURCHETTE EN OR

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