Le mot du mois

LE MOT DU MOIS

"Manger, c'est incorporer un territoire".

Jean Brunhes, géographe français (1869-1930)

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"Au fond des provinces, il existe des Carême en jupon, génies ignorés, qui savent rendre un simple plat de haricots digne du hochement de tête par lequel Rossini accueille une chose parfaitement réussie".

de Balzac, La Rabouilleuse, 1842.

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"Les animaux se repaissent, l'homme mange, l'homme d'esprit seul sait manger"

Jean Anthelme Brillat-Savarin (1755-1826).

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lundi 13 juillet 2015

CHEZ MIMI

Saint-Benoît par un temps de curé sans bréviaire, en cet hivers bien rentré. Nous allons déjeuner dans la zone de Bras-fusil, pas très loin de la nationale grimpant aux Plaines, dans le petit restaurant de Micheline Avril.

Nous débarquons à l'improviste et de bonne heure, comme d'habitude, accueillis par la patronne et un personnel souriant. Une jolie terrasse caillebottante dans un jardin luxuriant auprès d'une piscine est le décor de notre repas. La maison pratique le buffet à volonté. Les trois plats du jour sont : cari la patte cochon, poulet au coco et cari bichiques (congelés, ce que Mimi­ annonce d'entrée de jeu). Point d'entrée, et des glaces au dessert.
On nous propose un petit punch maison orange-ananas léger pour nous fouetter le système gustatif. Nous voilà partis à l'attaque.

Les bichiques ouvrent le bal. Il est entendu que si nous prenons comme maître-étalon le cari de bichiques frais vendus éhontément au prix d'un rein sur les bords de route en fin d'année, les bichiques congelés, intrinsèquement, n'en sont gustativement parlant qu'un reflet fantomatique. Ceci étant posé, le cari de Chez Mimi est d'une honnêteté de premier communiant. Bon assaisonnement tomaté, dans lequel le combava et le gingembre se répondent comme des commères, avec un sel qui paraît autant bavard en première louche mais finalement bien dosé. Un petit piment vert "crasé" aurait pu donner davantage de couleurs aux alevins que l'unique sauce piment disponible. 


Nous poursuivons avec le cari la patte. Ce dernier est parfaitement exécuté. Beau fumet de feu de bois, au piquant d'un poivre léger, belle couleur luisante sur une peau qui fond en bouche, peu de gras en définitive dans la sauce de fond de bac qui oint la viande, plus une jolie souplesse sous la dent. Un cari simple mais goûteux, et étonnamment digeste malgré les apparences. Juste un bémol : quelques petits os, dommages collatéraux d'une découpe cavalière, sont venus nous gêner les plombages.

Le poulet au coco suit le mouvement, en faisant encore mieux. Si la volaille a certainement passé son existence en communauté serrée, sa viande a la bienséance de se comporter dignement sous les dents de notre fourchette. Elle n'est pas avachie et affiche une saveur méritante, appuyée efficacement par le lait de coco à la douceur subtile. L'épaisse sauce se déguste d’ailleurs avec un plaisir certain, telle quelle, mais le riz ne lui fait pas honneur.

En effet, si les accompagnements sont satisfaisants bien que peu nombreux, ce riz, type basmati, aux grains fins, détachés et peu absorbants, ne convient absolument pas aux caris créoles dont on aime que les sauces colorent et imprègnent l'assiettée. Les sensations en bouche sont franchement décevantes, voire désagréables, n'en déplaisent aux détracteurs des riz plus épais, qui, s'ils ne sont pas cuits en colle, conviennent davantage. La marque et le type de riz sont donc à revoir.

Le repas se termine avec deux cafés et une addition de 31 euros pour deux yabs et un marmaille.

La petite mère Micheline porte bien son prénom : c'est une locomotive ! Un caractère bien trempé, avec une hospitalité créole authentique, sincère et sans ronds de jambe. Dans son jardin elle vous accueille comme quelqu'un de la famille, et c'est sans doute pour cela qu'elle a aussi ses habitués. "C'est la clientèle qui fait la carte" dit-elle, preuve d'une écoute des avis et des envies. Sa cuisine quotidienne, simple et familiale, est très bonne. Et elle sait aussi sortir des sentiers battus, quand elle fait le service traiteur pour la salle de réception qu'elle loue aux fêtards de toutes occasions. Son menu de tous les jours mériterait peut-être de s'étoffer d'une entrée et d'un dessert, plus deux rougails supplémentaires pour une meilleure harmonie avec les différents plats. Tout le reste, excepté un choix de riz sujet à débat, est d'une facture suffisante pour que nous octroyons à Mimi et son équipe une très belle fourchette en argent.



Pour résumer : 
Accueil :  bien • Cadre : bien • Présentation des plats : bien
Service : bien • Qualité des plats : bons

IMPRESSION GLOBALE : BONNE TABLE
FOURCHETTE EN ARGENT

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